1. La Faille


    Datte: 23/06/2019, Catégories: fh, Collègues / Travail nonéro, sf,

    ... avaient suivi notre irruption fracassante dans son univers. Tout en remettant pêle-mêle dans sa besace les babioles répandues dans l’entrée, je ramassai machinalement un petit agenda noir, qui dépassait à moitié sous le guéridon en vannerie où reposait son téléphone. Une pulsion phallocrate me poussa à feuilleter rapidement les pages diaphanes où courrait la fine écriture de Karina. Je n’étais cependant pas très fier de moi, à l’idée de pénétrer par effraction dans son jardin secret. Sur la dernière page figurait une liste de mots, barrés à coups de pointe bic rageurs. Tous, sauf le dernier : — Antartica. Qu’est-ce que ça pouvait bien vouloir dire ? Pas le temps de chercher, pour l’instant. On verrait plus tard ! Je remis l’agenda dans son sac à main, que je déposai ensuite bien en vue sur le guéridon. Au moment précis où ma main se tendait vers la poignée de la porte, j’entendis une toux discrète dans mon dos… Karina me regardait, appuyée à l’embrasure de sa chambre. Depuis combien de temps m’observait-elle ? Je me sentis mal à l’idée qu’elle ait pu surprendre mon sale petit manège. Si tel était le cas, son attitude n’en laissait toutefois rien paraître. — Alors, tu te sauves comme un voleur, sans même un au revoir ? fit-elle avec un sourire un peu triste.— Voilà que je me fais pincer ! Moi qui comptais faire mon petit effet, en venant te réveiller avec un plein sac de viennoiseries, irrésistiblement appétissantes… Et bien, tant pis pour la surprise. Son sourire s’éclaira ...
    ... et elle vint se blottir dans mes bras. Je l’enlaçai d’un geste gauche, un peu timide. — Et si on allait au café du coin, accompagner d’un bon chocolat chaud ces quelques croissants que tu comptais m’offrir ? me proposa-t-elle gaiement. Pour toute réponse, je l’embrassai avec fougue. Je me sentais à nouveau plein d’espoir, avec Karina à mes côtés. La vie semblait reprendre des couleurs, malgré la sombre prophétie qui pesait sur nous. Il me restait cependant un dilemme à trancher : devais-je lui parler de ma rencontre avec Franck 2034 ? oooOOOOOooo J’approchais de mes lèvres la tasse de café fumante, tandis que Karina plongeait la main avec un plaisir évident dans le sac de viennoiseries. Il était presque dix heures du matin. Nous étions assis à la terrasse d’un petit bistrot de quartier, prenant tout notre temps pour apprécier ce petit déjeuner tardif. Je n’avais pas abandonné l’idée de parler à Karina de mes craintes. Et aussi de l’aide précieuse qu’elle pourrait m’apporter. Il fallait simplement que je trouve les mots pour la convaincre. Je cherchais comment m’y prendre, quand je remarquai soudain un changement dans son regard. Il se perdait à présent au loin. Les traits de son visage s’étaient durcis. — Tu as de nouveau cet air préoccupé, Franck. Je crois que tu ne m’as pas tout dit, hier, au restau. Un des grands mystères de l’existence, c’est bien ce sixième sens que les femmes semblent avoir pour appréhender nos états émotionnels les plus intériorisés… Je n’allais pas ...
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