Pépète.
Datte: 10/08/2019,
Catégories:
fh,
jeunes,
amour,
... n’avait pas encore osé me présenter, car celui-là, j’aurais voulu l’écraser comme une mouche. En vérité, j’aurais pu me résigner, quoi de plus naturel ? Après tout, c’était ma faute. Pour l’avoir méconnue, je l’avais perdue. Je sentais que je ne la méritais plus et qu’elle s’était éloignée à raison. À cause de tous mes égarements, je l’admis. Or, elle était revenue, ou plutôt, je l’avais retrouvée. Alors, pouvais-je rester sur le même pied qu’autrefois à présent que montait en moi toute mon adoration ? Cela deviendrait insupportable à vivre. Peut-être que Pépète devinait mes états d’âme, elle était maintenant si étrange. De temps en temps, elle m’observait avec ce nouveau regard qu’elle avait, un regard grave et doux, mais en l’occurrence, un peu inquiet. Je ne le voyais pas mais je sentais le poids de ce regard, et c’en était assez pour me mettre mal à l’aise. C’était comme si elle me tâtait pour vérifier quelque chose, pour être certaine. Heureusement, le temps, ce grand maître, fit les choses, tout seul. Car enfin, arriva ce jour de grande confiance. C’était un dimanche, sur les quais. J’étais envahi d’une sorte d’allégresse un peu folle, et je me rappelais des temps anciens, lorsque Pépète n’était encore qu’une petite Heidi et moi une sorte de prince d’Euphor. Et je me suis mis à entonner ces chansons célèbres de Récré A2, ces génériques de dessins animés que nous connaissions par cœur. Aline se souvenait. Elle dut se revoir enfant car son visage s’anima d’une ardeur qui ...
... colora ses joues. Et puis, à son tour, elle fredonna Arnold et Willy : Personne dans le monde Ne marche du même pas Et même si la terre est ronde On ne se rencontre pas…* C’est alors qu’elle s’arrêta, émue. J’en devinai plus ou moins la cause. — Ça passait le dimanche après-midi, dis-je.— Oui, après le toboggan, le bac à sable du jardin, on se dépêchait pour rentrer. Tu te rappelles, André ? Tu me grondais, tu me trouvais toujours trop lente. En vérité, ce n’était qu’un prétexte, je voulais juste que tu me prennes sur ton dos. Je souris, je m’en étais toujours douté. — Maman nous préparait le goûter, tu venais regarder la télé à la maison. C’était les meilleurs jours. Et même si la terre est ronde… Sa voix s’altéra. — Eh bien, tu vois, Aline, cela arrive quand même.— Comment ? que dis-tu ?— On se rencontre quand même. Il y a une providence. Elle laissa échapper un soupir incrédule en secouant la tête. — Tu te trompes, André, ce n’est pas un hasard. Il n’y a pas de providence. J’ai attendu, figure-toi. Je savais que cela arriverait un jour. Je me suis montrée forte et patiente dans ce but. On ne m’enlève pas un… on ne m’enlève pas une affection dans le cœur comme cela, ce n’est pas facile.— Mais Aline, tu ne m’as jamais rappelé, tu étais toujours fâchée.— C’est-à-dire que tu l’as cru, homme de peu de foi.— Quatre années sans se voir, sans un mot, est-ce possible ?— C’était le temps nécessaire. Tu vois qu’il est vite passé. De toute façon, je ne pouvais faire autrement, tu ne ...