Sans fuir
Datte: 27/08/2019,
Catégories:
prost,
nonéro,
... dents et me relève vite. Je ne vais pas me laisser rampante, surtout pas à cause de lui. Je file direct sous le jet de la douche. Seul un filet d’eau jaillit, tant le pommeau est encrassé de tartre. L’eau nettoie mon corps, tout du moins la crasse invisible sur ma peau. Cette crasse née de la peur de tomber sur un pervers plus dangereux que les autres, sur un mac’ voulant nettoyer la rue pour ses filles. À moins que ce ne soit un toxico qui m’agresse pour quelques billets, synonymes d’un shoot pour lui. L’odeur infecte du mélange de tous mes clients s’évapore peu à peu. C’est un effluve nauséabond bien particulier. Le résultat de tous ces parfums se mélangeant, du plus onéreux au plus basique. Le croisement des haleines du client grossier à celui du timide, le regard en coin, qui est souvent celui le plus inquiétant car toujours imprévisible. Je ferme les yeux et tente d’oublier tout ce monde, de sa crasse, à son odeur et, le plus dur, ses bruits. Cette multitude de bruits qui hantent vos oreilles, assaillent votre esprit en tout temps et tout espace. Ce sont des bruits indéfinissables et pourtant qui me sont si familiers à la fois. Une fois encore, une énième fois, l’idée de tout quitter, de tenter ma chance ailleurs, loin, très loin, me revient sans arrêt en tête. Il faudrait un jour que je prenne mon courage à deux mains pour sortir de cette condition, de cet engrenage dans les bas-fonds. Je voudrais tant m’enfuir…S’enfuir, ce mot tourne sans cesse dans ma tête, ...
... tambourinant entre mes tempes, en résonnant de plus en plus fort. S’enfuir… S’enfuir… S’Enfuir… S’ENfuir… S’ENFUIR ! Au moment, où mon esprit commence à se concentrer sur le clapotis de l’eau sur le sol pour me calmer, j’entends dans la pièce voisine des bruits et une dispute qui éclate, une de plus. Ma courte escapade vers le monde de la quiétude s’arrête ici. Par réflexe, je tends l’oreille et reconnais à peu près les auteurs de la dispute. La première des voix, la plus forte est bien sûr celle du Boiteux, si familière. Non, pas familière, il ne fera jamais partie de ma famille, ni même de mes proches. Je lui accorde, tout au plus, le fait qu’il ne compte pas parmi mes ennemis. La seconde voix est plus fluette, je comprends mal ce qu’elle dit car c’est bien une fille, pas une femme qui parle. Il me faut un peu plus de temps pour la reconnaître précisément, soudain je la reconnais, c’est « Boumba ». C’est une des nouvelles protégées du Boiteux. Boumba, même si ce n’est sans doute pas son vrai nom, le vrai je ne le connais pas, mais ce patronyme renforce son côté « fille d’Afrique ». Le Boiteux en est tout content, ce type de fille manquait dans son stock, d’autant que c’est un peu la tendance, en ce moment. Je devine une baffe puis deux qui tombent. Je prends un peignoir troué et ouvre discrètement la porte pour voir ce qui se passe à côté. La scène que je découvre ne me surprend guère, on y est toutes passées… Le Boiteux a une sorte de tradition, concernant ses petites nouvelles. ...