1. We can be heroes


    Datte: 28/12/2017, Catégories: fh, amour, cérébral, pénétratio, fsodo, exercice, mélo, portrait,

    ... fout là, toute seule. Il réfléchissait, hochant la tête. C’est Gunther qui relaya mon avis. — Ce que Dieter essaie de te dire, c’est que tu devrais t’installer au piano. On te devinera plutôt qu’on ne te verra, mais Louise aura un point où ancrer son regard. Ce sera plus vivant, moins posé. Gianluca, tu pourrais lui prêter ton veston ? Andrzej s’exécuta, comme s’il n’attendait que cela, et prit place sur le tabouret, face au clavier. Je n’en revenais pas qu’il me laisse la main, l’autorité sur cette photo, la dernière, la plus marquante de la collection, peut-être. Et encore moins qu’il accepte d’y figurer, même de dos, même flou, hors de la profondeur de champ. Qu’il me croie aussitôt sur parole quand je lui dis que c’était parfait, et que j’étais prêt, qu’ils pouvaient se concentrer sur la pose. L’ambiance changea aussitôt du tout au tout. Il la regardait, elle le regardait la regarder, et il montait dans cet échange une intensité folle. J’avais parlé de perfection, mais je me trompais : elle ne surgit qu’ensuite, aussitôt qu’il se mit à jouer au piano, un air de Bach, je crois. La mélodie était grave, poignante, il lui offrait une grâce infinie, une délicatesse de mousse. Mi-couchée sur le piano, Louise n’était plus qu’abandon, il la caressait en musique, chaque note touchait son corps et la faisait vibrer, et lui-même vibrait en retour, plongé dans les abîmes de son regard. Ils avaient tout oublié, l’équipe, les boîtes à lumière qui s’illuminaient à chaque pression de ...
    ... mon doigt sur le déclencheur. Ils étaient seuls avec l’instrument, ils étaient eux-mêmes purs instruments. Et nous étions tous profondément émus. Alors, sans un mot, nous nous sommes discrètement effacés, nous les avons laissés là. Au bout de la salle, Gunther avait déjà récupéré mes clichés viaBluetooth, et imprimé la feuille, qu’il me tendit, tout en refermant derrière nous la porte de laMeistersaal. Ce n’était pas une photo. C’était de la musique. La pure harmonie de la musique. ~~oOo~~ Piste N°7 Love is Blindness, U2, 4’23" suivi de Heroes, David Bowie & Brian Eno, 3’33" Vous êtes là, vous lisez toujours ? C’est donc que vous croyez au pouvoir de la fiction. Alors peut-être entendrez-vous ma voix. Elle l’avait aussitôt compris, elle vous l’avait même écrit : ce lieu est habité. J’habite ici depuis si longtemps. Je fais partie des meubles. Je suis les meubles, je suis la poussière qui les couvre, je flotte dans l’odeur du parquet ciré. Je ne suis même pas un fantôme, je ne suis que l’esprit du lieu, le témoin inerte et muet de quelques moments rares. Je ne vis que de mes souvenirs. De tous les petits miracles intervenus ici, quand le talent était réuni. Il est de retour. Il va se créer quelque chose, c’est une telle évidence. Ils se sont regardés longuement, comme s’il s’agissait de retrouvailles. D’un retour du front. De celui qu’on attendait, de celle qu’on n’espérait plus. C’est le moment le plus étrange, le plus mystérieux. Le moment juste avant l’amour, est-ce déjà de ...
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