Pour le pire ou le meilleur - Histoires de Sexe

Pour le pire ou le meilleur

Ils s’étaient connus quinze ans plus tôt. Au hasard d’un stage professionnel. L’attirance mutuelle avait été immédiate. L’impossibilité d’y donner suite tout autant. Ils étaient tous les deux mariés. Malheureusement mariés, mais mariés quand même. Elle renonça à ajouter une histoire compliquée et un cortège de mensonges à cette pénible situation. Il n’avait pas trouvé la force de bousculer irrémédiablement sa vie sentimentale. Ils renoncèrent à céder à la mode débutante des communications virtuelles. De nombreuses lettres ponctuèrent donc cette relation particulière, dans un style qui n’appartenait qu’à eux. Feu d’artifice épistolaire, descriptions enfiévrées de leurs états d’âme, bouquets parfumés de leurs émotions à fleur de peau. Plusieurs rencontres avaient complété les émouvantes et humoristiques évocations de leur amour impossible. Ils se retrouvaient en cachette, au hasard de voyages professionnels, passant une partie de leur temps à découvrir les films qu’ils n’avaient pas envie de voir en solitaires. Puis à en discuter pendant des heures, en passant d’un bar à un autre au gré des heures de fermeture. Ils inventèrent aussi un jeu, appelé non sans cynisme « le pire OU le meilleur », mettant le doigt sur le fait qu’ils ne seraient jamais ensemble pour « le meilleur ET pour le pire », comme le veut la formule consacrée. Ils se fixaient rendez-vous dans un restaurant et le premier attablé lançait un dé. Les chiffres de un à trois donnaient le droit de choisir un lieu. ...

... Puis l’autre tirait le dé selon le même principe, déterminant s’ils partageraient le pire ou le meilleur. Un thé dansant complètement ringard dans l’arrière-salle d’un restaurant décrépi constitua le pire qu’elle lui fit subir. La visite guidée des cuisines d’un grand restaurant tenu par un de ses amis, suivie d’un repas gastronomique, fut le meilleur qu’il put lui offrir. Malheureusement, il leur fut de plus en plus douloureux de retenir leur envie de partager plus. Les efforts qu’ils s’imposaient pour étouffer leurs sentiments et leurs poussées de désir les épuisèrent. Ils auraient été faits pour s’aimer, mais n’arrivaient pas à le vivre ouvertement. Leur spontanéité commença à en souffrir. Ils cessèrent de se voir sans même l’avoir vraiment décidé. -ooo000ooo- Quelques mois plus tard, elle quitta son mari depuis longtemps désaimé, après avoir trouvé d’autres habits féminins dans l’armoire de leur chambre à coucher, au retour d’une semaine de travail dans une autre ville. Il lui fallut longtemps pour s’en remettre. D’autant qu’elle eut la garde de leur enfant et que ses moyens financiers étaient pratiquement inexistants. Elle songea à reprendre contact avec Justin, mais n’arriva pas à rédiger de missive cohérente. Elle trouvait à vrai dire juste assez de force pour travailler et survivre au jour le jour pour son enfant. De son côté il n’éprouvait apparemment plus le besoin de la retrouver autrement qu’en pensées fugitives. Quelques échecs sentimentaux et passablement de ...