1. Couleur Tournesol


    Datte: 23/12/2018, Catégories: hagé, fagée, campagne, jardin, amour, dispute, nonéro, mélo,

    ... Roux.— Cher Gilbert, une manif ne s’improvise pas comme ça. Et je ne suis pas sûr de pouvoir mobiliser les gens de Meilhaud pour les gitans. La plupart les tolèrent mais jamais ne voudraient avoir affaire à eux…— Et St Vincent, et Lavelle ? Et Perrier ? Et Champeix ? Ils pourraient nous rejoindre non ? Le curé n’arrête pas de citer notre solidarité auvergnate en exemple. C’est le moment ou jamais de la faire fonctionner.— Si encore c’était pour une manifestation contre le gouvernement je dis pas mais là…j’ai bien peur que mis à part une poignée de citoyens altruistes, les gens se fichent bien de nos hôtes des bords de Couze…— Alors il n’y a rien à faire ?— Si. Venez demain matin avant l’arrivée des flics…Vers six heures trente. Au moins pour la saluer une dernière fois. Je suis sûre qu’elle en sera touchée. C’est quelqu’un de bien !— Merci Alain ! Vous au moins, vous ne vous moquez pas de moi !— Il y a quelques années, je suis tombé follement amoureux… Alors je comprends…— Et qu’est devenue cette dame ?— La jeune femme avait l’âge de ma fille et un compagnon de son âge…J’ai pas voulu tout bousculer dans sa vie pour qu’elle me quitte dix ans après…A soixante ans, j’aurais pas supporté ça. Déjà mon divorce a été difficile. Pas vraiment envie de revivre ça !— Et vous n’avez jamais regretté ?— Si…tous les jours ! Et encore aujourd’hui. Alors ne faites pas comme moi ! Foncez ! Roux a souri en raccrochant le combiné. Il n’a plus l’âge de courir après une dame mais il ira la ...
    ... retrouver tout à l’heure, c’est sûr. Il peut pas la laisser partir comme ça. Non…On ne laisse pas partir le soleil. Surtout quand on a une tendance aux rhumatismes ! Après dîner, il prend sa canne, sa veste de laine bleue tricotée par Geneviève et un disque, une compilation de Brassens. Un truc qu’il écoute régulièrement et qui parle d’orage, de mauvaise réputation et d’auvergnat…comme lui…Parce qu’il voudrait que malgré la démarche d’André, du maire de Chidrac et du sous-préfet, Ethel ne parte pas fâchée. Il arrive près du camp alors que le soleil descend peu à peu derrière la montagne. Il entend le bruit des casseroles, les cris des enfants et aperçoit au fond les hommes qui fument en cercle autour d’un grand feu. Sans doute ont-ils reçu comme lui, la notification d’expulsion pour le lendemain et ils discutent de l’organisation… Il descend le chemin qui borde la départementale. C’est un passage dangereux. Presque un non-retour puisqu’il sait que s’il ne marche pas assez vite, une voiture pourrait facilement le faucher. Mais le risque en vaut la chandelle…Ethel est là-bas et il doit lui parler, remettre des couleurs, de l’espoir dans leur relation parce que c’est trop bête de partir comme ça, de casser ce qui était un tel miracle… Alors Roux, après un regard à gauche, et un autre à droite, s’avance et fait les plus grands pas possibles en serrant d’une main le disque et de l’autre son bâton de marche. Il pense à Ethel et cela lui donne du courage. Il pense à tout ce qu’elle a ...
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