Là où tout commence...
Datte: 05/02/2019,
Catégories:
fh,
fplusag,
Collègues / Travail
médical,
revede,
odeurs,
J’avais vingt ans, je sortais d’un échec en faculté et je travaillais comme contractuel dans cette clinique. Elle avait trente ans, elle était venue d’Albanie cinq ans auparavant et était aide-soignante. Nous ne nous appréciions guère. Comment cela avait-il commencé ? Je la trouvais froide et distante, conforté en ce sens par ce que je savais d’elle. Nathalia n’était pas aide-soignante en Albanie, elle était infirmière dans un grand cabinet chirurgical de Tirana. Son mari était ingénieur mais n’avait pas trouvé de travail en France, barrière de la langue. La famille était réfugiée politique mais j’ignorais pourquoi. Leur fils était né avant la migration, leur fille après. Bref, j’étais informé du fait que là-bas le couple faisait partie de la classe aisée et qu’ici il vivait dans la cité HLM d’une ville de province, à quatre dans soixante-dix mètres carrés, avec son seul salaire d’aide-soignante pour vivre. Belle dégringolade sociale. On aurait été aigri pour moins que ça. J’avais l’impression qu’elle noyait son amertume dans le ménage. À la clinique, sa réputation de miss Propreté n’était plus à faire. Elle ne prenait jamais de pause, pendant que nous étions attablés à boire un café elle frottait fenêtres, chaises, tables, tout ce qui pouvait être frotté. Une de nos collègues qui vivait à deux pâtés de maison de chez elle racontait qu’au domicile c’était la même chose, elle lavait ses carreaux plusieurs fois par semaine et le balcon subissait le même sort. Cela n’aurait eu ...
... aucune importance si elle n’avait pas passé son temps à me faire des réflexions sur mon manque d’hygiène et de méthode au travail. Il est vrai que je ne connaissais rien à l’hygiène hospitalière, étant entré sans formation, et que niveau méthode je laissais à désirer, mais le soin qu’elle prenait à me rabrouer virait au harcèlement. Plusieurs fois il m’arriva de l’envoyer promener, excédé par son omniprésence. Mais je progressais petit à petit et au fil des mois elle relâcha la pression ce qui apaisa de façon continue nos relations. Je cessais de la détester mais nous ne devînmes pas amis pour autant. D’ailleurs, elle n’était réellement proche que d’une personne sur notre lieu de travail. Maria sa voisine de quartier était la seule à qui elle se confiait un minimum. Tunique impeccablement repassée, boutonnée jusqu’au col strictement, cheveux attachés en chignon parfait, visage apathique et communication minimale de simple courtoisie, Nathalia était d’une pudeur extrême, ce qui ne facilitait pas le rapprochement avec les autres membres de l’équipe et la laissait un peu isolée. Le temps passait, nous constations malgré tout qu’elle faisait des efforts et qu’elle se décoinçait petit à petit. À sa mesure bien sûr, je veux dire par là qu’elle commençait à sourire un peu, à s’asseoir avec nous pour boire le café… C’est alors que tout commença. Un jour, alors que nous avions fini en avance le travail de la matinée, nous décidâmes de marquer une pause. Nathalia, visiblement de bonne ...