Aïcha, ou les exils
Datte: 12/09/2019,
Catégories:
fh,
ff,
hotel,
anniversai,
amour,
confession,
historique,
... presque épargnés, mais les deux grandes barres construites dans notre proximité immédiate firent bientôt peser leur menace. La joyeuse convivialité qui avait été jusqu’à la promiscuité finit par disparaître tandis qu’une méfiance généralisée s’installait. D’Arabes que nous avions été, nous nous transformâmes en riches, entendez que nous n’avions rien à faire ici, et, en un sens c’était vrai. Une violence sourde se développait que les déboires de ma fille illustrèrent parfaitement quelques années plus tard. J’avais alors quarante-neuf ans, et à l’instar de Kadour bon pied bon œil et même des charmes pas trop flétris, la jambe bien tournée et le buste altier. Mon fils, médecin généraliste, travaillait pour une ONG, quant à Claire, âgée de vingt-trois ans, assistante sociale, elle exerçait son emploi dans un centre d’accueil de réfugiés. Elle logeait souvent chez nous et, en ce week-end de juillet, elle nous demanda si elle pourrait convier et nous présenter son aimée à notre fête-anniversaire, le dimanche suivant. Nous ne soupçonnions rien et fûmes très réjouis par cette annonce. — Et comment donc, vilaine cachottière, non seulement tu peux, mais tu le dois et nous en serons enchantés. Elle respira profondément et lâcha : — Papa, maman, je voudrais vous avertir qu’elle est Marocaine, se prénomme Aïcha, a vingt-huit ans, un garçonnet de trois ans et est prof d’art. Il y aurait mensonge à prétendre que nous évitâmes un bref flottement, néanmoins prétendre que la foudre ...
... s’abattit sur nous serait fort exagéré ! Kadour presque immédiatement rétorqua avec bienveillance : — Eh bien voilà ma fille lesbienne, pour comble entichée d’une Mauresque, et nous, propulsés au titre de grands-parents. Pouvait-il mieux résumer son adhésion. Quant à moi, je me souvins de ce jour où j’avais annoncé à ma mère que je m’étais donnée à lui. J’ajoutais donc : — Comment pourrais-je récuser Aïcha, elle sera bienvenue, depuis toujours ce prénom me poursuit, par contre moi qui comptais inviter ta grand-mère, je suppose qu’il vaudra mieux m’abstenir. La nouvelle Aïcha fit une entrée saisissante dans la famille et nous conquit tous deux, sitôt notre seuil franchi. Kadour déclara : — On dirait l’Aïcha d’il y a vingt ans !— Ne me flattez pas, lorsque je découvre madame aujourd’hui, je me sens bien disgracieuse. Monsieur Ferrad, si vous nous aviez rencontrés toutes deux il y a vingt ans, vous ne m’auriez pas même aperçue. C’était excès de modestie, la jeune femme était splendide et rayonnait de jeunesse, de beauté et d’amour pour Claire. Mes préjugés me conduisaient à concevoir les Marocaines toutes identiquement grassouillettes, aux seins et fesses rebondis écrasant d’un corps dodu des cuisses massives. Cependant les préjugés sont faits afin qu’on s’en déjuge et Aïcha s’appliquait à démontrer l’incongruité du mien. Elle développait une stature fine et gracieuse, de belles rondeurs certes, mais dépourvues de tout excès, juste divinement attirantes. Son visage était un sourire ...