Le temps du baiser
Datte: 22/09/2017,
Catégories:
ff,
jeunes,
couleurs,
école,
amour,
Voyeur / Exhib / Nudisme
init,
exercice,
journal,
mélo,
... ouvre la bouche la première. On respire plus. La pointe de sa langue sort de sa coquille et vient glisser prudemment sur mes lèvres. C’est chaud, mouillé, encore un peu timide. Une sorte de petit escargot circonspect et gluant. Un pur baiser de l’enfance. Jusqu’à ce qu’à mon tour, j’ouvre les mandibules et que je vienne tâter à l’aveugle cette drôle de petite chose rose qui frappait à ma porte. Bref ! De pudibond, c’est devenu carrément glouton ! Le patin sans retenue. Maladroit, mais si bon. Ça fait des grands « slurp ! » comme chez ces gens-là qui mangent la soupe de Brel. On se tartine grave le menton de salive, on est des goinfres, des goulues… à danser le french-cancan ?« Eh bien, Cassandre, elle est où ta foutue pureté ? En purée de nous deux, ta pudeur ! » Et ça chauffe le sang, ces ébats buccaux : deux langues qui s’enroulent l’une sur l’autre, explorent du palais à l’épiglotte, tâtonnent dans les sécrétions généreuses de glandes situées quelque part dans cette drôle de cavité… qu’on qualifie de « buccale » ! Orgie bacchanale ? Ne décomposons pas ce dernier adjectif ! Ça fait donc ça ! Le corps qui devient comme de la dentelle ou du coton. Un genre de gaze volatile. Une sensation de transmigration des fluides, voire des âmes. On ne se lâche plus, on ne bouge plus… Quoique ! On titube un peu, ivres sans savoir pourquoi… Il est impératif de rester l’une au creux de l’autre, douillettement nichées, et de se humer, et de se boire, et de se sustenter comme des cannibales ...
... affamées l’une de l’autre. Impératif d’oublier surtout le reste, ce qui nous attend tout au bout du tunnel. Comme tu m’as vite cédé ! Tu devais en avoir « terriblement » envie, ma gazelle des steppes du nord. Tu es purement animale, toi aussi ! Bien sûr, tu as le droit de pleurer dans mon cou, maintenant. Tu vois, ce n’était rien ce petit saut dans l’inconnu. Il n’avait rien de diabolique en tous cas. Un baiser : juste un échange de chaleur et d’humeurs ? Pourquoi est-ce toi qui reviens à l’abreuvoir de mes lèvres ? N’est-ce pas mon rôle, à moi, de te guider ? Tu ne t’en lasses pas ? Continue, alors ! Bois-moi ! Je veux fondre dans ta bouche. Être un bonbon acidulé qui se dissipe en toi pour voyager dans ton œsophage, descendre dans la cathédrale de ton estomac. Et puis visiter les orgues de tes intestins afin de me dissoudre définitivement dans ton sang. Je naviguerai alors jusqu’à ton cœur mystérieux. Et peut-être même que je m’aventurerais jusqu’en haut, dans le labyrinthe de tes pensées étranges. C’est simple : pour accéder à ton esprit, il faut d’abord que je me noie dans la fange de ta chair. Et « réciproquement », comme le dit avec à-propos Pierre Dac. Plus prosaïquement, peut-on aimer quelqu’un qu’on n’a pas baisé ? Ben non ! Il nous faut du temps pour nous séparer. Dès que l’une entame un mouvement de repli, l’autre s’agrippe comme une arapède à son rocher. Craint-on la déchirure ? Si je me sépare de toi, la réalité va-t-elle nous retrouver et nous saigner à blanc ? ...