1. Le transfert


    Datte: 23/09/2017, Catégories: f, Collègues / Travail fantastiqu,

    ... suis la prudence même, depuis que je fais plus de compète. Au fait, tu chausses du combien ?— Du quarante-et-un. Pour les bottes ?— Oui, t’as des grands pieds pour un fille, ça ira en ajoutant une semelle. Voilà, tout est au point, on n’a rien oublié. On ferme le labo, chacun son sac puis on quitte le bâtiment pour s’engager sur le parking. C’est quasi désert, normal pour un vendredi soir. Pas un pet de vent, c’est un grand calme qui nous entoure et ça tombe bien. L’odeur de feuilles mortes nous enveloppe. C’est une fraîche nuit étoilée, la vague de froid annoncée n’est pas encore là. Parfois, on bosse tellement qu’on ne voit plus rien, on ne vit plus. Pour reprendre pied, le mieux, c’est la nature. Le parking du dernier bâtiment qu’est notre labo est cerné par les bois, sorte de clairière dans la forêt. La nuit sans lune laisse place aux étoiles. Y en a tant que ça ! me saisit toujours la surprise à ce moment-là. Alors, je me sens vivre et recouvre, comme après une longue absence, une connexion avec l’univers dont je suis une infime partie. Sur le moment, je me sens différent. Maintenant il y a une bonne raison. On ne se parle pas car tout est dit. Chacun dans ses pensées, on essaye d’entendre nos corps pulser ou quelque chose comme ça. Nos démarches sont empesées, presque maladroites, comme semble parfois la foulée d’un nain. Qui nous verrait pourrait croire que l’on redécouvre la marche, après une journée de vélo, un mois d’hibernation ou deux semaines de navigation. ...
    ... L’apprentissage des corps ne fait que commencer. Les voitures nous attendent sagement. Je songe, en souriant, que les bagnoles ne s’apercevront de rien, facile comme premier test ! Une fois dans nos véhicules respectifs, on s’installe et on fait le petit tour d’inspection des commandes, cérémonial habituel lorsqu’on se fait prêter un véhicule. J’insère la clé et démarre, vroum, c’est quand même impressionnant cette folie, me dis-je alors. J’ai pas eu à toucher au siège ni au rétro : très pratique ! Je me vois, enfin, l’autre disons, quittant le parking au volant de ma voiture, un petit signe d’adieu, et voilà. C’est fait. *** Me voilà dans mon appartement, vautrée sur le canapé. Marrant, les escaliers en courant. Avec la forme physique de Tiphaine, je ne me sens pas essoufflée, non, ce n’est pas cela. J’avais juste moins la caisse, moins de puissance pour galoper sur les marches. Et ces gros seins, c’est chiant, ça se balade, on est presque déséquilibrée quand on court. Heureusement que Tiphaine m’a mis un soutien-gorge de sport dans son sac. « Tu vas voir, ça serre fort, mais c’est normal. » Je me tâte un peu, ayant l’étrange plaisir mélangé d’aimer peloter une poitrine tout en sentant celle-là caressée. L’impression est trouble. Il est plus de deux heures du mat et je commence à piquer du nez, mais j’ai trop envie de me faire des trucs. Arrivée dans la chambre, je mets un coup de lumière tamisée, je me demande pourquoi, puis je m’assois sur le lit, en face de la glace de ...