Les Héritières (1) - Histoires de Sexe

Les Héritières (1)

... femmes promises par leurs aptitudes à de hautes responsabilités devaient assimiler ces notions dans le but de faire progresser la condition féminine. Sappho s’enorgueillissait de former les Amazones de ce début de XXIème siècle comme d’autres avant elle, une par génération, avaient instruit les chantres de l’émancipation féminine. Les tablettes de l’université des Héritières révélaient des personnages prestigieux. – Vous commencez par quoi ce matin ? demanda Karen attentive à l’heure. Emmy jeta aussi un œil à sa montre. – La Grèce antique, tu sais combien Sappho aime raconter l’histoire de sa lignée. La poétesse qui vécut sur l’île de Lesbos à la moitié du VIIe siècle av. J.-C. serait surprise de la trace qu’elle a laissée. – À commencer par son nom, pouffa la surveillante satisfaite de l’empressement des pensionnaires à quitter le réfectoire pour se préparer aux cours. Le sérieux faisait partie des qualités requises à l’admission. – Oui, j’ai hâte de voir leurs réactions à ce sujet. L’encadrement au complet dans le réfectoire à la pause-déjeuner de midi constatait les prémices d’une évolution certaine. Si les chuchotements témoignaient encore d’une certaine réserve, les barrières tombaient entre les pensionnaires, les langues se déliaient. La directrice se réjouissait de se savoir à l’origine de la détente, que son nom fleurisse sur toutes les lèvres n’était pas pour lui déplaire. La promotion 2016 baptisée Simone de Beauvoir recelait des talents prometteurs. – Vous y ...

... croyez à cette histoire ? demanda Anne incrédule à la tablée attentive. Que la poétesse à l’origine ait adopté une jeune fille choisie parmi ses disciples, qui plus tard en adopta une à son tour, et ainsi de suite jusqu’à aujourd’hui, me parait exagéré. Le regard sombre dans le vague, Saejin osa une approche méconnue du grand public. – C’est possible au contraire. Sappho fut condamnée à l’exil pour ses critiques envers la politique menée par la famille royale de Mytilène, elle devait prudemment réserver ses réflexions à un cercle d’initiées. – Oui mais elle a eu une fille légitime nommée Cléïs, coupa Marine décontenancée, pourquoi en adopter une autre ? Quelques rires indulgents saluèrent la remarque. – Parce qu’un enfant ne suit pas toujours la voie des parents, reprit Saejin ramenée à sa propre histoire. Cléïs ne partageait peut-être pas les opinions politiques de sa mère, et certainement pas son attirance envers les femmes, pouffa-t-elle sans retenue. Sappho ne devait compter que sur les plus ouvertes à sa philosophie pour transmettre son héritage, elle voyait dans l’homosexualité le seul moyen d’émancipation à l’époque. L’adoption est devenue une tradition familiale qui se perpétue encore de nos jours. Anne considéra avec une pointe d’admiration la jeune Coréenne dont les arguments lui permettaient d’accepter la version de la directrice. Elle aurait volontiers partagé avec Saejin autre chose que des observations philosophiques sur la lignée de Sappho mais la demoiselle jouait ...