Un goût fumeux
Datte: 23/05/2021,
Catégories:
fh,
extracon,
copains,
cérébral,
Voyeur / Exhib / Nudisme
Giboulées de mars obligent, toutes les saisons avaient défilé au cours de la journée dans un ballet incessant de nuages, de vent, de pluie et d’éclaircies. Ne manquait plus que la grêle. Pour le moment un grand soleil brillait dans le ciel, ridiculisant mon grand imperméable et mes chaussures de pluie, si utiles ce matin. Trois heures de réunion avaient achevé de me filer un début de mal de crâne. Polo déboula enfin au coin de la rue sur sa bicyclette, cheveux au vent (combien de fois lui ai-je répété de porter un casque ?). Paul-Louis, dit Polo, est un grand brun méditerranéen au rire franc et détonnant. Nous avons en commun le goût des concerts de musiques du monde, l’amour de la bonne bouffe et la passion des jeux de société. Et il se trouve que nos lieux de travail et d’habitation respectifs sont suffisamment proches pour lui demander de me déposer chez moi un soir de panne de tramway. Il suffira que je monte sur le porte-bagage et… quelle ne fut pas ma stupeur en constatant l’absence de porte-bagage ! — Mais… tu as dit que tu pouvais me déposer à vélo !— Tu vas grimper sur le guidon, annonça Polo.— Hein ? Tu plaisantes, ton engin va plier sous mon poids !— Je ne te demande pas ton poids. Et je suis sûr que ça ira. Voyant mon air circonspect, il me suggéra d’aller attendre le bus. La perspective d’une petite marche suivie d’une longue attente d’un bus bondé et de la sensation de nausée à chaque virage me décida à faire un essai. Je m’installai alors les jambes de part ...
... et d’autre de la roue avant, posai mes mains sur la barre métallique et me hissai comme on se hisse sur un muret. Me voilà les jambes dans le vide, me tenant tant bien que mal dans un fragile équilibre. Quelle position inconfortable ! Et pendant 8 kilomètres, n’est-ce pas de la folie ? — Tu vois, ça roule ! commenta Polo. Un inquiétant craquement se fit entendre et je sentis que je descendais de quelques centimètres. — Ce n’est rien, c’est la barre du guidon ; elle n’ira pas plus bas. Reste en équilibre ! Pas du tout rassurée, je me cramponnais à ses avant-bras tandis qu’il commençait à pédaler. — Je veux descendre !— Non, on est lancés. Si on ralentit, on va perdre l’équilibre.— Méchant ! J’espère qu’on ne va pas croiser un de mes collègues… ou un flic… ou pire, un client ! Je soupçonnais Polo de faire exprès de passer devant mon bureau sous prétexte d’aller à la boutique de vélos la plus proche afin de regonfler le pneu avant. La descente fut délicate et toutefois sans encombre. Pendant que le vendeur procédait au gonflage, je remarquai que mon « chauffeur » était bardé d’étiquettes de toutes les couleurs des entreprises dans lesquelles il intervient. — Tiens, cadeau, dit-il en glissant autour de mon cou un porte-badge rouge portant la mention « visiteur ».— Chic alors, je vais accrocher mes clés pour ne pas les perdre, comme les mamies. Une fois que le vendeur eut fini par convaincre mon ami d’acheter une bouteille d’huile pour la chaîne, je remontai sur mon dangereux ...