On va s'aimer - Histoires de Sexe

On va s'aimer

... suis dans mon propre corps à cause de toutes ces années passées à me taire et faire semblant d’obéir en essayant de faire bonne figure. Déjà il craque, sombre et se meurt inexorablement, épuisé par ses mensonges répétés jusqu’à l’écœurement, tout en semblant faussement vivant à cause de son goût pour les apparences. Nous parvenons enfin à l’extrémité d’un cycle. Mais vous deux, par contre, êtes la vraie vie. Vous que je connais bien êtes des justes, au sens fort, comme il y en a très peu. Votre amour est sincère, mais il ne gonfle pas d’orgueil, car vous avez su conserver un cœur de pauvre. Pour cette raison, le royaume des cieux vous appartient. Vous, par votre jeunesse et votre grâce féminine, êtes les anges précurseurs d’une ère nouvelle, celle où l’Amour sera l’unique et impérieuse loi, quand tout le reste apparaîtra soudain futile et divertissement. Ce n’est pas moi qui vous bénis : c’est au contraire vous qui me sanctifiez par vos liens sacrés de chair et vos tendres luxures. Chacune des caresses que vous vous prodiguez sans compter, chacun de vos frissons, de vos soupirs, de vos tressaillements à l’instant où votre sexe humide exulte, sont remplis d’une espérance qui nous dépasse tous et finira, j’en suis convaincu, par vaincre tout mal. Il marque un temps de silence, reprenant son souffle. — Pour ma part, reprend-il, il serait déplacé de me plaindre de mon sort, car j’ai eu la chance d’observer tout cela. Déjà je reçois votre lumière qui ensoleille mon âme, et je n’ai ...

... plus peur de la mort dont je sens le souffle glacé sur ma nuque. Les quatre cavaliers de l’Apocalypse sont tout proches : j’entends déjà leur galop frénétique. Oui, les temps ont déjà changé, et l’heure de votre triomphe est enfin venue. Vos noms sont déjà inscrits tout en haut des cieux. Enlacez-vous, étreignez-vous, bécotez-vous sans crainte et sans limites, élancez-vous ensemble vers les sommets de la volupté, et jouissez d’un même cri. L’Esprit d’Amour, qui est aussi un esprit de tendresse et de vérité, est descendu sur vous malgré les nombreux obstacles que les hommes ont dressés sur votre route, mais tout cela est à présent facilement balayé par la puissance du Paraclet. Il fond en larmes, en tenant son ventre à deux mains. — Mes amies tendres et douces, poursuit-il d’une voix brisée, excusez-moi, mais je n’en peux plus. Mon vieux corps me lâche, et le crabe qui me ronge depuis trop longtemps lance ce matin son offensive finale. Pour vous deux, tout peut commencer enfin, mais pour moi, le combat est déjà perdu : il faut que tout cela se termine. Continuez à vous aimer sans moi, je vous prie. Je voudrais vous entendre gémir de plaisir, et aussi la succion des lèvres sur le sexe, les baisers humides. Entre vous, soyez câlines. C’est ma dernière volonté. Ne trahissez jamais cet amour qui vous porte, et répandez tout autour de vous la joie qu’il vous donne. Sachez que croiser votre chemin a été la plus belle chose que ma pauvre vie ait connue. Comme un pantin dont les fils ...