55.4 Après le déluge (partie 1, Toulouse – Gruissan).
Datte: 01/07/2018,
Catégories:
Entre-nous,
Les hommes,
... de tempe à tempe m’achève : j’ai du mal à mettre un pied devant l’autre. J’ai besoin d’un lit, j’ai besoin de dormir, dormir pendant des jours et des semaines, dormir pour ne plus souffrir, dormir assez longtemps pour en oublier même les raisons de ma souffrance. Dormir jusqu’à l’oublier. Jusqu’à oublier même son nom. Soudainement, la perspective de m’éloigner de Toulouse avec ma cousine semble dégager un peu l’horizon devant moi. Accalmie précaire, illusion d’un instant, fragile, chancelante. Le retour de la tempête me guette au prochain carrefour : lorsque sa présence transperce ma rétine, vrille mon cerveau, déchire mon cœur, mes tripes. Je le vois débouler à la toute dernière minute et je manque de le percuter. Je l’évite de justesse et je me rattrape à une voiture garée contre le trottoir pour ne pas tomber. « Désolé ! » il me lance, en plantant son regard de b(r)aise dans le mien, tout en attrapant ma main pour m’aider à me relever. « Ce n’est rien, ce n’est rien… » je répète, complètement désorienté, happé par la fragrance, par le bouquet frais et boisé qui se dégage de lui. C’est un bobrun, un très bobrun, du genre bad boy, petite frappe, charmant au possible, sexy à se taper la tête contre le mur ; il est habillé d’un simple t-shirt blanc col rond, pas spécialement ajusté, avec un jeans déchiré ; la cigarette au bout des lèvres, il plisse les yeux en tirant dessus. « Ça va aller ? » il se renseigne en attrapant sa cigarette du bout des doigts, entre le pouce et ...
... l’index, la grimace typique du fumeur sur le visage lorsque la nicotine brûle ses bronches. « Oui ça va aller » je réponds mécaniquement, alors que je suis happé par son regard, désorienté par un trop plein d’émotions nouvelles. « Salut ! Et encore désolé… » fait-il, avant de repartir. « Salut ! » je lâche tout bas, en le regardant s’éloigner. Oui, salut, bel inconnu. Salut et adieu. Dans une seconde, tu m’auras oublié. Pas moi. Je te regarde marcher devant moi, le pas rapide, assuré, très mec ; je te regarde marcher vers ta vie, laissant derrière toi une intense trainée de parfum de mec : c’est une fragrance qui m’est bien familière, car elle a souvent hanté mon nez et mon cerveau pendant de nombreux moments sensuels. Si tu savais, bobrun inconnu, comment tu me rappelles des tas de souvenirs, à quel point tu me fais penser à lui… Tu as le même regard brun, intense, ténébreux, chaud comme la braise ; tu t’habilles comme lui, simplement mec, t-shirt blanc et jeans ; et même si je devine que, sous ton t-shirt, tu es certainement moins bâti que lui, tu portes le même parfum ; tu as les mêmes attitudes de mec, très mec, lorsque tu fumes ta cigarette. Te voir, c’est comme une claque dans la figure : car, te voir, c’est comme le voir, lui. Une claque qui, en une fraction de seconde, fait tout remonter en moi… tout ce que je veux oublier… C’est pas possible, je n’arriverai jamais à l’oublier… La migraine ne me lâche pas d’une semelle, elle transforme ma tête en grosse caisse. J’ai le ...