Science-affliction
Datte: 13/07/2018,
Catégories:
sf,
... amoureuse. Il avait accepté, il lui avait dit oui pour le bébé. Depuis qu’elle l’avait rencontré, depuis qu’elle avait compris qu’il était l’homme de sa vie, elle désirait avoir un enfant de lui. Même si elle ne se l’avouait pas, ce désir si fort de maternité était pour combler un manque en elle, pour donner à sa progéniture l’amour d’une mère, cet amour qu’elle n’avait pu recevoir. Au début, quand la pandémie de grippe A s’était abattue sur le monde, et sur la France en particulier, elle avait trouvé ça amusant. Elle avait sept ans pendant l’hiver 2010, quand son école avait fermé pour limiter la progression du virus. C’était comme des vacances inespérées, une période de Noël qui se prolongeait. Le médecin était passé à la maison pour la vacciner. Il était rigolo avec son masque ridicule. Et puis le temps avait commencé à lui paraître long. Elle n’avait pas le droit de sortir, elle ne pouvait pas aller voir ses copines, ni même aller jouer au square. Les semaines se passèrent ainsi ; Léa enfermée, cloîtrée, séquestrée même, entre les quatre murs de l’appartement. Ses parents continuaient à aller travailler, il fallait bien gagner sa vie malgré tout. Et puis un jour, sa mère avait commencé à tousser. Rien d’inquiétant en cette saison hivernale, un gros rhume ou une petite bronchite. Elle n’était pas allée consulter le médecin, elle n’en voyait pas l’utilité. Et puis un matin, c’était début avril, cela ferait dix-huit ans dans quelques jours, Léa l’avait retrouvée morte, ...
... allongée dans la cuisine. Plus tard, en grandissant auprès de son père, elle apprit que la pandémie avait fait cette année-là sept cent cinquante mille morts en France. Les victimes furent moins nombreuses l’année suivante car il y avait plus de vaccins disponibles, les laboratoires pharmaceutiques avaient eu le temps de rattraper leur retard de production et la campagne de vaccination avait été élargie. Aujourd’hui elle voulait cet enfant pour l’inonder de cet amour dont on l’avait privé. Elle voulait une petite fille, pour lui donner l’enfance heureuse qu’elle-même n’avait pas vécue. Elle la prénommerait Marie, comme sa mère, pour lui offrir une seconde vie. Elle poussa un peu plus son bassin en avant pour aller à la rencontre de ce sexe dur qui l’emplissait, pour encore mieux sentir cet amour chaud et palpitant, pour lui arracher son liquide de vie. oooOOOooo Lucas Eveno habitait en banlieue, à quinze kilomètres du siège parisien de la chaîne. Il estima que le trajet lui prendrait environ cinq minutes, si les vents n’étaient pas contraires. Il se glissa dans sa nacelle et en ouvrit les récepteurs. Lentement il s’éleva dans les airs. Il choisit une altitude qui semblait dégagée et enclencha le propulseur. Il pensa fugacement aux déplacements de son enfance, aux embouteillages sur le périphérique, à l’odeur nauséabonde des gaz d’échappement, à son père qui insultait les autres automobilistes. Si l’automobile avait été l’invention du XXe siècle, le propulseur solaire était ...