1. Corps céleste


    Datte: 20/06/2017, Catégories: amour, historique,

    ... vrai son travail à Dussaillant, c’est une fête des sens, comment il élève l’abstraction du motif jusqu’à faire chanter d’essentielles courbes et vibrer, marteler dans la tôle le relief du volume comme on conduit le raisin de la grappe au tonneau. Pour en tirer le meilleur, révéler son intime caractère. C’est avant qu’ils ne servent les surfers, cognac sur Tonic avec un glaçon dans le rôle du Beach Boy, que l’autre est arrivé. Il avait raté les discours mais pas l’ambiance, cette atmosphère un peu électrique moitié sensuelle un peu sexuelle qui planait dans la salle, il est arrivé hâve, certaines parmi les amies du buffet se sont demandé d’où il sortait parce qu’habillé à la va-comme-je-te-pousse mais une jolie petite gueule vague souvenir d’Harrison Ford, cuir flingué patiné et cette besace gonflée d’on ne savait quoi mais un goulot en dépassait. Un clochard presque qui aurait trimballé sa bouteille des fois que ça vienne à manquer sous les latitudes où il atterrissait. Et ce cri qu’il a poussé : « Dudu ! » et elles se sont dit alors les chemisiers crèmes et cognac dont les seins balançaient doucement dans la soie, d’où il sort celui-là ? Mais justement Dussaillant se retournait : « Sacré voyou, d’où tu sors ? » et la joie qui se peignait sur son visage alors, l’autre à la besace, il est rentré dans le clan. Entre eux. Ils étaient entre eux. Et la conservatrice : « Jean-Pierre ! Mais tu sors d’où ? » Moins clochard, plus aventurier, les amies du buffet l’ont mieux regardé, ...
    ... une moitié de sourire dans le regard, à contempler d’humaines retrouvailles. Un peu plus, elles l’ont regardé. Des fois que. Et lui : « De nulle part comme d’habitude. Enfin pas tout à fait j’ai eu le carton au courrier y a deux jours. » Et il a mis ses bras autour des épaules de l’artiste, ils se sont étreints, embrassés, comme des qui ne se sont pas vus depuis des plombes mais quittés comme hier comment tu vas. Il a pensé Laurence ravissante, toujours aussi resplendissante il se souvenait de l’expo de Méchain et comment elle était déjà si belle. Quatre ans presque qu’ils ne s’étaient vus mais il avait ce souvenir intact d’une femme resplendissante et volontaire. Il a juste dit : « Tu ne changes pas Laurence. Et bravo pour tout ça ! » Il montrait les œuvres tout autour et son plaisir de les voir accrochées là. 22 juin 2006, Cognac, Musée des Beaux-arts, Vernissage Dussaillant. Loin du buffet. Les voilà tous les deux à se congratuler d’avoir su rester amis. À se féliciter d’être là, de ne jamais s’être menti, d’éviter de se rater et le jeune alors qui sort : « Justement j’ai pensé à toi » et fièrement il extrait de sa besace la bouteille dont le goulot… Il ajoute juste : « Une rareté, je crois… » Dussaillant, dans un sourire qui dit merci, prend la bouteille de cognac. Il la regarde, la soupèse comme s’il voulait à travers le verre apprécier son arôme mais son geste brutalement se suspend : « D’où tu sors ça ? » Interrogation presque sèche, mais le jeune n’y prête garde qui lui ...
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