1. Sur le fauteuil


    Datte: 10/10/2018, Catégories: En solitaire,

    ... fois pendant ? – Si je te dis que non, tu me croiras ? – Pas le moins du monde. – J’y ai toujours pensé. Au lycée, il y avait trois ou quatre filles de la classe que je ramenais avec moi presque tous les soirs. Tu en faisais partie. – C’était qui les autres ? – Anaïs… Caelia… Romane… Amina… – Tu as bon goût. Et maintenant ? – Maintenant ? Maintenant on est tout le temps ensemble tous les deux. Toute la journée. Partout. En amphi. En TP. À la bibliothèque. Au resto U. Ici, au café. Tu es là, constamment à portée de regard. On se parle. On en parle. Alors forcément tu es aussi avec moi quand je le fais. Il y a même des fois où… – Où ? – Où j’ai hâte de te quitter pour aller te retrouver. Et toi ? Tu me fais venir ? – Oui. De plus en plus souvent. De plus en plus longtemps. – Et tu imagines quoi ? – Qu’on le fait tous les deux ensemble. Côte à côte. Sans qu’il se passe rien d’autre. – Ça, c’est vraiment pas difficile à réaliser… On n’a pas voulu que ce soit tout de suite. Pour avoir le temps d’y penser. D’en avoir envie. De l’imaginer, chacun de son côté. Ou ensemble. On en parlait. On se racontait comment ce serait. Ça se déployait en mots. Ça existait. C’était comme si ça avait eu vraiment lieu. Alors on changeait. Autre chose. Autrement. Jusqu’au jour où… – On le fait ? On le fait vraiment ? On a roulé jusqu’à la mer. On l’a longée. On l’a laissée nous lécher les pieds. On a imprimé nos pas dans le sable. On a beaucoup parlé. Mais pas de ça. Pas une seule fois. Et puis ...
    ... elle a voulu se baigner et on s’est poursuivis en grandes gerbes d’éclaboussures heureuses. Le soir, on a dîné aux chandelles, d’huîtres, de moules et de vin blanc dans une petite auberge à glycine et volets bleus. On est restés à discuter, les yeux dans les yeux, jusqu’à ce que, autour de nous, toutes les autres tables aient été libérées. Je me suis couché le premier. Elle m’a rejoint dans l’obscurité, s’est silencieusement coulée auprès de moi dans le lit. Il s’est passé du temps. Beaucoup de temps. Et puis comme un frémissement à côté. Une vibration. Un tremblement. Mes doigts sont descendus se refermer sur moi. Elle a respiré plus vite, plus profond. Ça s’est affirmé, amplifié, en moutonnements délivrés. Une jambe est venue se poser contre ma cuisse, s’y est appuyée, ancrée. J’ai accéléré mon mouvement de va-et-vient. Elle a haleté, doucement gémi, s’est plainte, cabrée. Elle a déferlé. Je me suis répandu au hasard. Elle m’a recueilli, du bout des doigts, et est retournée vers elle… Au réveil il faisait grand jour. Appuyée sur un coude, le menton dans la main, elle me regardait. On s’est souri. – Tu pensais à quoi, pendant, cette nuit ? – Qu’on le faisait dans notre café. Sous la table. Avec tous les gens autour qui pouvaient nous voir. Et toi ? Elle a ri. – En plein amphi. Sans nous cacher. Avec tous les regards sur nous. Tu aurais vu leurs têtes ! Elle a repoussé drap et couverture jusqu’au pied du lit. – On recommence ? C’était deux jours plus tard. Dans le grand amphi. ...