1. La brouette de Zanzibar


    Datte: 18/10/2018, Catégories: fh, jeunes,

    Pierre-Octave restera donc seul en ce long week-end pascal ; il n’a pas souhaité accompagner ses parents dans leur résidence secondaire de Golf Juan, prétextant d’importantes révisions à faire. Ah, oui, nous avons oublié de le présenter : Pierre-Octave est le cadet de six enfants d’une riche famille. Ils habitent à Neuilly dans la banlieue huppée de l’Ouest parisien. Ses cinq frères et sœurs volent maintenant de leurs propres ailes et ont acquis des situations qui les mettent à l’abri du besoin. Lui a encore plusieurs années à faire avant de devenir juge d’instruction comme il en a le souhait… Il est fier de pouvoir dire qu’il fera un jour ce métier qui lui permettra de lutter à sa façon contre la permissivité ambiante et le relâchement des moeurs. Pierre-Octave est myope comme une taupe et sa peau est restée malade depuis sa puberté. Il a peu d’amis, on va même dire qu’il n’en a pas du tout, il avait donc organisé sa solitude en se passionnant pour le modélisme, et après s’être frotté aux avions et aux bateaux il cherchait à modéliser des objets des plus insolites, des meubles grands ou petits, des instruments de musique, des monuments… Ce samedi matin, il s’est levé de bonne humeur, malgré les nouvelles tristes que diffusait la radio. Ainsi le vieux pape ne se remettait pas… Son rêve d’aller à sa rencontre aux prochaines journées internationales de la jeunesse en Allemagne s’évanouissait petit à petit… Comme il aurait pourtant aimé y emmener Marie-Adelaïde ! Mais sans doute ...
    ... d’ici là le pape serait-il décédé et un autre pape aurait pris la place, mais sans avoir l’aura du dernier, il ne pourrait jamais dire : « je l’ai vu, moi, de mes propres yeux en 2005 et j’y étais avec Marie-Adelaïde ! » Il passa rapidement sous la douche, son corps s’était musclé, il ne fréquentait certes pas les salles de musculation, ne supportant pas l’odeur de sueur qui s’en dégageait ni les regards appuyés de certains hommes trahissant par là leurs pulsions homosexuelles conscientes ou inconscientes. Non, il s’entraînait à la maison, il avait tout ce qu’il fallait, il avait sa mini-salle de musculation pour lui tout seul et il était le seul à y pénétrer, à l’exception bien sûr de la femme de ménage. Il n’allait quand même pas faire le ménage, non ? Il se lava le corps comme il en avait l’habitude, au savon de Marseille. Il avait horreur des odeurs, elles étaient pour lui toutes agressives, que ce soit les mauvaises, la sueur, l’urine ou les soi-disant bonnes, pourquoi se parfumer ? Il n’en voyait décidément pas la raison, il ne la voyait déjà pas chez les femmes, alors chez les hommes ! Non, la seule odeur qu’il supportait c’était celle du « propre », celle émanant du savon tiède ! Puis il examina son visage, le récent traitement dermatologique d’un pourtant très renommé spécialiste des hôpitaux de Paris ne donnait pas plus de résultats que les autres. À 22 ans il restait boutonneux, acnéique, quand un de ces vilains boutons guérissait, un autre surgissait ailleurs, et ...
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