Manon ou l'amour interdit (7)
Datte: 13/08/2017,
Catégories:
Lesbienne
7. Manon ne sentait plus la froideur du carrelage s’insinuer jusque dans ses os. Elle ne percevait qu’un flou lumineux qui filtrait à travers ses paupières presque closes. Un brouhaha de plus en plus étouffé semblait d’éloigner. Puis quelques minutes, ou quelques heures, plus tard, une nouvelle agitation dont elle ne percevait que des ombres qui passaient devant elle. Elle ne remarqua pas le masque qu’on posa sur sa figure, l’aiguille qui s’enfonçait dans son bras. Il lui semblait qu’on la portait sans savoir vers où. Puis une grande lumière vive, des lumières qui dansent, avant de retrouver une obscurité moins violente. Manon sombra dans un sommeil où plus rien n’avait d’importance. Un bip lointain et régulier sonnait aux oreilles de Manon. Ses paupières frémirent et s’entrouvrirent. Des murs blancs, des machines. Elle réalisa qu’elle était attachée sur un lit, une perfusion dans le bras. Elle continua de parcourir la pièce. Une personne, une femme, sommeillait sur un fauteuil. — où je suis ? demanda Manon La femme sursauta. — mon chaton, tu es enfin réveillée. J’appelle l’infirmière. — Julia ? — oui mon cœur, c’est moi. Pourquoi tu as fait ça ? Pourquoi ? — fait quoi ? demanda Manon. Puis tout remonta d’un coup à sa mémoire. Le départ de Julia, son refus de l’emmener avec elle, les ciseaux à ongles, le sang qui coulait de son poignet. — pourquoi tu es là ? demanda Manon — parce que c’est de ma faute si tu es là. — non, c’est moi. — ne dis pas de bêtises. J’ai eu le temps ...
... de réfléchir en trois jours. De beaucoup réfléchir. — ça fait trois jours que je suis là ? — oui chaton. Tu as eu de la chance que ton copain soit rentré plus tôt que prévu. Mais il a fallu t’évacuer par hélicoptère jusqu’à Bordeaux — tu parles d’une chance, dit Manon. — ne dis pas ça. Ne dis jamais ça. Il faut que je t’explique deux ou trois choses sur moi avant. Et peut-être que tu comprendras. Mon père a fait fortune dans le commerce du vin. Mais il a commencé tout en bas de l’échelle, comme ouvrier viticole. Mais mon père était ambitieux. Et arriviste. Il a grimpé tous les échelons pour y arriver. Sa connaissance du vin et du monde du négoce lui a permis d’avoir des contacts partout dans le bordelais. J’ai toujours su que j’étais homosexuelle. Mais bien sur ça ne plaisait pas à mes parents, et surtout à mon père qui ne voulait pas de gouine chez lui. Et plus il essayait de me mettre dans le droit chemin, et plus je le provoquais en m’affichant avec ma copine du moment, en lui roulant des pelles devant lui. Et plus j’en faisais, et plus il s’énervait. Je ne te dis pas le nombre de correction que j’ai reçue. Mes parents sont décédés il y a maintenant quatre ans, dans un accident de la route. En voulant éviter un chevreuil, leur voiture a percuté un platane. Depuis ce jour, je me suis juré de vivre ma vie à fond sans vouloir m’attacher à qui que ce soit. Ne pas m’enfermer et passer à côté de plein de choses. Et ça marchait très bien, jusqu’à que ce tu entres dans ma vie. ...