Tombé du Ciel
Datte: 10/05/2019,
Catégories:
fh,
jeunes,
uniforme,
campagne,
amour,
volupté,
historique,
ecriv_f,
... disposées autour de lui. Il feuilletait le dictionnaire. « Merci beaucoup mademoiselle, c’était délicieux » Son accent mal assuré me fit éclater de rire et je lui répondis « Mais de rien Monsieur l’Américain ». Puis la pièce est retombée aussitôt dans le silence. J’ai entrepris de m’occuper de sa blessure, mais cela semblait l’agacer, il voulait le faire lui-même. J’ai tout de même fait le nécessaire et il finit par s’y résoudre et attendre sagement la fin. Puis je me suis assise en face de lui. Je ne ressentais plus la froideur du lieu, ce grand vide qui était maintenant réduit au halo jaune et dansant du feu. Le dictionnaire était entre nous. J’ai donc tenté de lancer la conversation en cherchant à savoir ce qu’il faisait ici. C’était extrêmement laborieux, il fallait chercher chaque mot. Une simple question pouvait prendre cinq minutes, pour la poser. Et quand finalement nous y arrivions, nous devions la répéter de nombreuses fois tant nos accents étaient flamboyants et risibles. Mais nous avons persévéré et j’ai pu apprendre ce que je voulais savoir. Il était pilote et avait été descendu à plusieurs kilomètres d’ici, il y avait déjà quelques jours. Il les avait passés à se cacher et à se déplacer la nuit, lentement, sans trop savoir ce qu’il cherchait. Puis il voulut savoir si ce qu’on appelait la Résistance existait vraiment, et si je saurais y avoir accès. Il voulait les rejoindre pour que l’on puisse arranger son départ de la France, afin de regagner un territoire ...
... allié. Deux heures furent nécessaires à ces explications succinctes et à y répondre tout aussi maigrement. Je connaissais de loin quelqu’un qui, disait-on, était mêlé à cette fameuse Résistance. Je ne savais pas si cela était vrai, mais je promis de lui rendre visite dès le lendemain. Il s’appelait Thomas Owen, il avait 24 ans. Il m’a dit de quel Etat il était, mais j’ai oublié aussitôt, sans même d’ailleurs être certaine d’avoir bien compris ce nom bizarre. Il était très tard, d’habitude à cette heure je dormais depuis longtemps. Toutefois, je n’avais pas sommeil, animée d’une sorte d’excitation. Se pouvait-il qu’enfin il se passe quelque chose dans ce coin de pays encore plus morne depuis l’arrivée des Allemands, et que ce quelque chose, ce quelqu’un, m’arrive à moi. Je ne pus fermer l’œil avant les premières lueurs du jour. Immobile dans mon lit, détaillant le vieux plafond tout craquelé, j’ai fait le décompte des implications de sa présence chez nous. Si les nazis le trouvaient, nous y passions tous. Devais-je en parler à mon grand-père ou plutôt tenter de le lui cacher ? Et si ce Blanchon, le Résistant, n’en était pas un, qu’allais-je faire de l’Américain ? Je ne sais comment, mais malgré la répétition insistante de ces questions, j’ai fini par m’endormir… Pour quelques heures à peine, car je devais aider ma grand-mère à quelque tâche à laquelle je ne pouvais possiblement échapper. Elle remarqua mes traits tirés et ne manqua pas de m’interroger, mais j’étais alors experte ...