Examen
Datte: 04/01/2020,
Catégories:
fhh,
Collègues / Travail
médical,
cérébral,
intermast,
Oral
pénétratio,
double,
délire,
humour,
Vendredi, 09 h 56 Le parlophone grésille. La secrétaire tend la main, machinalement, sans quitter son écran des yeux. — Catherine, est-ce que Monsieur V… est arrivé ? Catherine abandonne le moniteur deux secondes le temps de vérifier ce qu’elle sait déjà… Parfois, le cerveau nous fait faire des choses ineptes. — Il est là, Madame. Pas difficile : il n’y a que nous dans la salle d’attente. Elle et moi. Ce n’est pas l’heure des consultations, c’est l’heure des expériences. — Dites-lui de patienter. Je suis à lui dans un quart d’heure. Catherine se redresse, écarte la mèche colorée qui lui sert de para-gens. Acajou, la mèche. Verts, les yeux surmaquillés. — Madame va vous recevoir dans…— J’ai entendu, merci. « Je suis à lui dans un quart d’heure… ». Notre langage est une mine d’or, truffée de sous-entendus, d’allusions, de malentendus, de déceptions. Il est 9h59 et je bande. Sur la table basse devant moi, quatre magazines à peine. Deux revues de mode, une revue de voyage et un hebdomadaire rasoir entre actualité et politique. Le plus récent aura deux ans dans un mois… Je ne fais même pas semblant de m’y intéresser. Images dans mon crâne. Tension coutumière. 10 h 16. Savez-vous ce qu’un hypothalamus peut vous faire subir en 17 minutes ? Savez-vous ce que le mien peut me faire subir ? Et à vous, lectrice imprudente, jeune, moins jeune, demoiselle, dame, avez-vous vraiment une idée claire de ce qu’il peut vous faire subir ? Tant qu’il sera là, en vie, je n’arrêterai pas le ...
... déballage. Ce sera à vous d’arrêter. 10 h 16. Le parlophone enfin : — Faites entrer Monsieur V…, Catherine. Et, s’il vous plaît, apportez deux cafés et demandez à notre patient s’il désire boire quelque chose. Le regard vert, un rien excédé, m’interroge, un sourcil en l’air : — Vous désirez boire quelque chose ? (Nom de dieu, oui, Catherine, petite secrétaire blasée, qui posez votre ennui chaque jour de la semaine devant votre paperasse ! Oui, je désire boire quelque chose !) — Un simple verre d’eau, merci.— Vous pouvez entrer. Madame vous attend. Je me lève avec cette espèce de déhanchement disgracieux censé dissimuler mon état. J’avance vers la porte du cabinet non sans appréhension : le film de l’autre jour, je l’ai revu plusieurs fois, identique à un détail près. Dans la version remaniée, le string est orange… Je respire un grand coup et je rentre. Dans mon dos, la secrétaire tire peut-être des conclusions de mon attitude, par expérience : ce gars-là, se dit-elle, doit subir une méchante intervention, ça se voit. Madame la neurochirurgienne n’est pas derrière son bureau. Elle est debout devant une machine, genre photocopieuse, juste à côté d’une table de consultation matelassée. En face d’elle, devant une autre machine, plus massive et plus barbare encore, un jeune homme, petite trentaine, cheveux noirs bouclés, un peu négligés, rasé d’avant-hier. Tous deux ont enfilé la blouse blanche de fonction par-dessus leurs vêtements. Elle porte une jupe noire et longue sous l’uniforme, ...