Saint Matthieu et l'ange
Datte: 27/09/2020,
Catégories:
fh,
hplusag,
religion,
Collègues / Travail
revede,
pénétratio,
... sourcils en gros plan. — C’est ça ; à la porterie, il y avait un frère portier, plutôt âgé, pour contrôler les entrées et sorties, récité-je.— Ce n’était pas une sœur ?— Non : les archives précisent que c’est un frère. Soixante-dix-huit moins quarante-trois ?— Trente-cinq. Alors, le monastère était mixte ?— Pas exactement. Il y avait des frères convers qui s’occupaient des tâches « profanes » indispensables à la vie des sœurs cloîtrées. Ils se croisaient peu. Pas du tout, en théorie. Donc, il y avait un frère à la porterie, puis par là-bas, il y avait l’hôtellerie.— Et là, un frère ?— Oui, un frère convers. En lien direct avec le père immédiat.— Ce n’était pas une abbesse ? J’ai l’impression qu’il me teste. Je me redresse et me lance dans une explication de ce que j’ai cru comprendre. — En fait, il y avait bien une abbesse, mais il y avait aussi un logement pour les visites du père immédiat. Celui qui représentait l’abbaye mère, qui était en général une abbaye d’hommes. Il n’était pas toujours sur site. Mais il y avait un aussi prêtre, pour les messes, et il habitait près du père immédiat. Ça devait faire un petit amas de bâtisses, par ici. J’indique la zone avec de grands gestes. Il commence à faire rudement chaud et les cigales tournent à plein régime. — De là, pas très loin, le bâtiment des convers, en lien avec l’église. Puis un couloir vers le cloître, et immédiatement le parloir et le logement de l’abbesse. Vous voyez, ça fait beaucoup d’intermédiaires entre les ...
... hommes et les femmes, justifié-je. Et il y a bien deux kilomètres entre la porterie et le cloître. Après deux heures de relevés et de défrichage sommaire, nous décidons de nous accorder une pause. Je prends place au pied d’un pin, pas trop près non plus pour éviter que la résine ne colle mon tee-shirt. Frère Matthieu s’assoit sur un bloc calcaire en face de moi ; il appuie son dos contre un chêne vert et croise ses doigts derrière sa nuque. Son front est maculé de grosses gouttes de sueur. Il s’appuie sur les yeux et grimace. — Chaud ?— Migraine, répond-il. Je bois à ma gourde et la lui tends. Il marque un temps d’arrêt. Il ne me vient pas à l’esprit que je suis une femme et lui un moine, et qu’il n’est peut-être pas correct de poser sa bouche là où quelques secondes auparavant il y avait la mienne. Tant pis. Il finit par en avaler quelques gorgées et essuie son front d’un revers de manche. — Est-ce qu’en buvant au même goulot, on enfreint les lois de la clôture ? questionné-je en croisant les bras. Un sourire fin se dessine sur ses lèvres et ses yeux étincellent. À son tour de m’offrir un cours magistral. — Je pense que oui. Sa réponse est concise. Un rayon de soleil vient frapper l’arrière de sa tête et auréole ses cheveux clairs. — Mais personne n’en est témoin, alors ça n’a jamais existé que pour nous. Et plus sérieusement, nous sommes deux êtres humains, il fait trente-cinq degrés à l’ombre. Dans ce contexte, les lois de la clôture s’effacent derrière les lois de la nature. ...