1. Acte manqué


    Datte: 04/08/2021, Catégories: fh, cérébral,

    ... l’imposante collection de pipes, cigares et autres objets fumeux qu’elle contenait. Même si j’avouais que je nourrissais quelque tendresse pour les volutes de fumée et leur odeur piquante, je préférerais que l’identification de mon cher psy à papa Freud se limitât à son œuvre et non qu’elle s’étende jusqu’à son cancer de la sphère oro-bucco-faciale. Comme quoi mon psy avait ses faiblesses, comme tout le monde. — Je vous écoute. Évidemment, il n’attendait que ça, que je déroule le fil de mes idées comme elles venaient et sans que je ne les juge, afin de rebondir judicieusement sur celles-ci, m’amenant à faire un pas de côté, parfois un bond dans ma pensée. Ce faisant, je découvrais peu à peu des rouages invisibles de ma vie, ce qui me donnait autant de clés pour choisir d’en changer le cours. Je n’étais parfois pas en accord avec ses interprétations, ce qui me donnait matière à argumenter et à élaborer. Et même lorsque je restais muette, indécise ou sous le coup d’une émotion forte, il était constamment à l’affût de mon regard, de mes gestes, de mes micro-expressions, de tout ce que mon corps disait pour moi. — Vous êtes beau. C’était vrai. Il était resplendissant dans sa chemise blanche immaculée, sans un pli, oui, impeccable. Et c’était ce qui m’était passé par la tête, il n’y avait aucune raison de ne pas lui en faire part. Il se garda bien de répondre et masqua discrètement un sourire derrière ses mains croisées. — J’ai envie de vous faire l’amour. Le temps d’un ...
    ... battement d’aile de papillon, de mignonnes petites rides s’étaient formées au coin de ses yeux. — Vous savez que nous avons quelque… quatre décennies d’écart, répliqua-t-il enfin. Je haussai les épaules, amusée. Il connaissait mieux que quiconque la jeunesse comme l’âge avancé de certains de mes amants et amantes. Ses cheveux mi-longs encadraient son visage dans un appétissant poivre et sel. — Et alors ? L’inconscient n’a pas d’âge, affirmai-je avec taquinerie Il prit un air grave. — Vous savez que je suis marié.— Et alors ? répétai-je— La société…— C’est pas mon problème. Je jubilai, tout sourire, imprimant ses réactions dans un coin de ma mémoire. — Vous croyez qu’il suffit de faire ce qu’on désire, sans en voir les conséquences ? Vous sortez en toute innocence du jardin d’Éden ?— C’est pas mon problème, répétai-je obstinément. Et si elle est aussi belle que vous, je veux bien la baiser elle aussi. Il soupira, ses pupilles sombres rivées sur les miennes. Il pesait ses mots. Il savait ma méfiance face aux injonctions à la norme. Et qu’il ne pourrait pas me servir des banalités. — Elle est celle que j’ai choisie et qui me convient.— Aimer n’est pas posséder. Et puis… c’est pas un peu dépassé le concept de l’âme sœur coupée en deux, Platon, tout ça ? Je ne veux pas me marier, moi. En plus, je suis sûre que ça serait très plaisant. Après m’être emballée je savourais son silence. J’avais hâte de connaître sa réponse. — Vous êtes incorrigible !— Oui je sais.— C’est inadmissible dans la ...