Une passe ? Je trépasse. - Histoires de Sexe

Une passe ? Je trépasse.

... prix-là pour survivre, c’est… je n’arrive pas à comprendre. Moi, j’étais comme un jeune chien fou ! Avide, mais incapable d’assumer, étourdi, perdu autant dans la grande ville que dans ma vie… Je crois bien que je me sentais comme un Quasimodo, sans la laideur sans doute, mais grotesque dans son comportement… Alors qu’elle… Cynthia, elle me paraissait sublime… même (ou surtout) dans la déchéance de sa condition. Vous n’avez pas pu le remarquer, mais je la vouvoyais quand elle me tutoyait. Je me sentais minable, voilà tout. Elle, c’était une princesse déchue, mais elle restait avant tout princesse ! Même s’il y avait quelque part, dans un bar non loin de là, un mac qui la guettait… un mac… pas un prince déchu !— Mouais, tu veux te faire passer pour un romantique, peut-être… « le sublime et le grotesque » ! ironise-t-il. Mais tu dévoyais le romantisme, non ? Et ton récit prouve que tu continues à vouloir le dévoyer… Tu serais une Emma Bovary au masculin, en quelque sorte, – je te parle de la jeune Emma, pas de celle qui s’est pris le mariage avec son bovin de Charles, en pleine figure –, sauf qu’elle, Emma, ne se serait sûrement pas commis avec un gigolo pour inaugurer sa vie sexuelle. Parce qu’elle voulait du sentiment… Et toi ? Je souris, un peu jaune : — Moi aussi ! Mais c’est le sentiment qui ne voulait pas de moi !… Ou plutôt, quand j’avais le sentiment, je n’avais pas le reste : à la longue, ça lasse ! Et de guerre lasse, j’ai décidé de les dissocier – provisoirement ...

... –… Et puis vous n’ignorez pas que Madame Bovary s’est suicidée… Seulement, quand j’ai vu Cynthia, sur le trottoir, mon cœur, autant que ma queue ont fait « Boum ! ». J’ai rêvé d’elle, vous savez, et je suis retourné la voir après la première fois… à plusieurs reprises. Je me suis imaginé, aussi, que si je l’avais rencontrée dans d’autres circonstances…— Stop ! Arrête de fantasmer… Il ne se serait sûrement rien passé. Tu veux que je te dise ce que je crois ? Ce sont les circonstances qui t’ont… comment dire… frappé de stupeur, je ne dirais pas de stupeur amoureuse, mais c’en est proche. Le lieu, le moment, ton état, tes désirs ont forgé le mythe de cette frénésie qui t’a saisie à son égard… Autre lieu, autre moment… change les circonstances, un seul paramètre, et tout sera différent !… Tiens, par exemple, le manteau de fausse fourrure… retire-le de ton histoire et il est probable que tu n’aurais pas réagi de la même façon !— Peut-être… mais bon sang, qu’elle me plaisait ! Et qu’elle continue de me plaire… en rêve. Les autres fois, quand je suis retourné la voir, je l’ai interrogée, j’ai tenté de connaître son histoire, j’ai même voulu savoir si elle avait un mac !… Quel con ! Comme si le fait que je la payais me donnait le droit de m’immiscer dans sa vie… Elle m’a poliment, je dirais même élégamment, rembarré… Je n’ai rien appris… rien de rien… et même aujourd’hui, avec le recul, j’ai honte de moi. Elle assumait, me semble-t-il, sa situation, beaucoup mieux que moi, qui ne ...