Waterloo
Datte: 22/12/2017,
Catégories:
nonéro,
portrait,
historique,
... d’oppositions allait-on rencontrer dans l’établissement de cette vérité (s’il s’agissait bien de la vérité) ! Il ne s’agissait pas là d’une simple affaire de meurtre ou de vol de diligence : il s’agissait ni plus ni moins de remettre en cause une partie de l’Histoire d’un pays, de grandir les actes d’un homme et de le faire entrer dans la légende, aux dépens de la parole du gouvernement français et de celle d’un empereur que tous, y compris bon nombre de ses ennemis d’hier, considéraient comme un des plus grands génies de tous les temps, l’égal de César et d’Alexandre le Grand. La tâche n’était pas simple ; il était hors de question de prendre le risque de se tromper. Allan Pinkerton ouvrit la première chemise… *************** Notre histoire commence étrangement le 15 novembre 1846, dans le comté de Rowan, quelque part en Caroline du Nord. Peter Stuart Ney, vieux professeur à la retraite, se meurt dans la maison de son ami Osborne Foard. Alors que ce dernier se tient à son chevet, le moribond lui fait signe de s’approcher et de se pencher vers lui afin qu’il puisse lui confier quelque chose avant de partir dans l’au-delà. Foard se penche, et l’entend murmurer ces mots : « I will not die with a lie on my lips: by all that is holy, I’m Marshall Ney of France. » (Je ne veux pas mourir avec un mensonge sur mes lèvres : par ce qu’il y a de plus sacré, je suis Ney, maréchal de France.) Stupéfaction ! Dans cette petite bourgade, beaucoup ignorent qui est le maréchal Ney et les ...
... exploits qu’il a accomplis. Mais rapidement quelques liens sont mis en évidence : Peter Stuart Ney, recruté comme professeur au collège de Davidson, semblait bel et bien débarquer de nulle part. Aimable, chaleureux, toujours prêt à plaisanter, le géant roux restait obstinément élusif quant à son passé, aimant à déclarer « L’obscurité est ma gloire… », ce que bon nombre d’habitants avaient mis sur le compte de son appartenance à la franc-maçonnerie, qu’il ne cachait pas. Oui, Peter Stuart Ney avait tout du soldat. Une force de la nature, une habileté au sabre peu répandue dans le milieu universitaire, et une manière de monter à cheval qui ébahissait bon nombre de femmes. Mais au-delà de tout ça, il était véritablement instruit et cultivé. Hormis l’histoire militaire et ses connaissances parfaites des batailles qui avaient mis l’Europe à feu et à sang jusqu’en 1815, il parlait le grec, le latin, et jouait merveilleusement de la flûte. Ses amis se souvinrent également de cette façon particulière qu’il avait de cacher les quelques lettres qui lui parvenaient de France. Et également du malaise qui un jour s’était emparé de lui à la lecture de l’une d’entre elles. Il avait soudainement défailli et était tombé lourdement sur le sol. À son réveil, il avait déclaré avec des larmes dans les yeux : « Napoléon est mort… Je ne retournerai jamais en France. » À partir de ce jour, son comportement avait changé. Il s’était mis à boire plus, et plus souvent. Au point d’être tombé fin saoul sur une ...