1. Rhapsody in blue - Troisième partie


    Datte: 07/10/2018, Catégories: fh, regrets,

    ... Dans la lumière tamisée, tu me dévisages avec une intensité inhabituelle. Je devine sans que tu les prononces les mots que tu aurais envie de dire. Tu sais Michael, je crois que je déteste autant que toi les adieux. Inutile de s’éterniser sur l’effroyable thème du regret, et du manque. Je ne tiens vraiment pas à aborder ce vide qui va revenir entre nous, nous séparer, nous éloigner petit à petit, jusqu’à ce qu’un monde entier s’y soit glissé, froid et impalpable. – Eva, je… – Je vais surtout prendre une douche. À tout à l’heure, dis-je brutalement. Le sourire du type au café a réapparu dans mon esprit, brûlant comme du fer rouge, immense comme un ciel d’hiver à l’aube, transparent, infini. Une réalité qui n’est qu’une vérité. Le bonheur se partage à deux, tandis que le malheur se conjugue presque toujours à la première personne du singulier. Je jette mon bout de carotte restant dans la poubelle de la salle de bains et me glisse sous le jet bouillant de la douche. Puis, enveloppée dans ma serviette humide, je me remaquille avec soin. En sortant de la salle de bains, j’ai retrouvé ma douce humeur habituelle, patiente et placide. Tu es allongé sur le lit, lisant. Une musique sirupeuse s’échappe de la chaîne hi-fi. – Salut, dis-je. Tu me jettes un vague coup d’œil. D’ordinaire, je me serais habillée en vitesse, mais là, je n’en éprouve pas l’envie. Je saute sur le lit avec un rugissement de lionne, et tu éclates de rire. Nous roulons sur le matelas, puis tu me fixes d’un air ...
    ... étrange, et nous ne bougeons plus. – Tu es jolie, comme ça, dis-tu. – Humm. Qu’est-ce qu’on fait ce soir ? – Manger une fondue, ça te dit ? – Oui, pourquoi pas ? – Lisa m’a appelé pendant que tu prenais ta douche. Ça ne te dérange pas si elle vient avec nous ? Nous devons la rejoindre au rwestaurant. – Restaurant. Répète après moi, répliqué-je mielleusement. – Arrête, je n’ai pas d’accent. Ce n’est pas vrai. Je te donne une bourrade dans un rire moqueur. – Ne sois pas stupide, Mike. Tu es obligé d’avoir un accent. Et pour le resto, ça ne me dérange pas du tout. Au contraire. J’avoue que la perspective de passer ma dernière soirée à Genève dans un tête-à-tête avec toi, ne me remplissait pas forcément de joie… Tu me contemples encore, de cette drôle de manière qui me bouleverse et me donne presque envie de pleurer. On dirait que tu veux marquer dans ta mémoire chaque détail de mon visage. L’adieu pèse sur nous comme une menace angoissante, alors que je suis heureuse de partir. Je ne veux pas que tout ça dégénère en quelque chose qui n’a pas de fondement. Inutile de nous prendre la tête avec notre séparation, regretter un rapport qui n’existe pas ; car nous ne nous aimons pas. J’aurais bien envie de te le rappeler. – Il faut être prêt à quelle heure ? demandé-je. – Ne te presse pas, nous avons le temps. Ce n’est pas loin. Nous irons à pied. Je réponds que de toute façon, je n’ai plus qu’à m’habiller. Tu m’embrasses sur le front avec légèreté, puis glisses ta bouche dans mon cou, ...
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