Ballerine
Datte: 14/01/2019,
Catégories:
ff,
... comme une bête de somme qu’il fallait dompter et dont on pouvait abuser. Elle nous proposait donc, après quelques acquis théoriques portant notamment sur la respiration et l’équilibre, de se mettre au service du corps, de lui obéir, de le laisser nous entraîner. De laisser le rythme et la joie animer le corps. La danse devait être un exercice d’abandon. Pour une fois faire taire le rationnel et écouter enfin ce que le corps avait à nous dire, librement, sans souci de performance. Dès le premier cours, Jasmine me fit une forte impression. Il y avait comme un accord singulier entre ce qu’elle était et ce que son corps exprimait. Elle était unifiée, posée, sans cette excitation nerveuse qui nous affecte tant. Son corps semblait totalement habité, comme baigné d’une lumière qui animait, éclairait et réchauffait chaque parcelle de son corps, ce qui lui donnait une grâce, une élégance, un charme naturel qui n’avaient pas besoin de recourir aux artifices de la mode. Elle parlait peu ; elle laissait son corps s’exprimer. Elle corrigeait à peine nos mouvements, nous demandait juste de l’imiter mais surtout de ressentir dans notre corps le mouvement juste. Le corps le connaissait, il fallait lui laisser la liberté de l’exprimer. Par mimétisme, on absorbait son aisance du corps, sa liberté d’être. Lors du sixième cours où l’on devait s’initier aux danses africaines, Jasmine nous attendait demi-nue, n’ayant qu’un châle blanc à longues franges posé sur ses hanches. Ce qui aurait pu ...
... paraître choquant et totalement déplacé ne l’était absolument pas chez Jasmine. Elle était belle, très belle ; une beauté affirmée mais pas criarde, pas exhibitionniste. Elle savait que son corps exprimait ce qu’elle était, totalement, et l’affirmait. Elle avait demandé, sans l’exiger, que les étudiantes se dénudent aussi, qu’elles libèrent enfin leurs seins. Comment pouvait-on, disait-elle, demander au corps d’être à l’aise de nous exprimer selon notre nature propre, de bouger selon notre propre rythme si on en a honte, si on tente de toutes sortes de façons de le cacher, de le camoufler, de le contraindre, de le trahir ? Quelques étudiantes avaient osé. Pour ma part, je n’avais pu m’y résoudre. Je le regrettais. C’était pour moi une révélation de voir un corps bouger, de voir tout un corps bouger avec une telle aisance, et Jasmine bougeait avec une telle grâce, une telle harmonie. C’est à ce moment-là que Jasmine me plut. Au retour de ce cours j’avais constamment son image en tête. Cette femme était l’être le plus extraordinaire que j’avais rencontré et je m’aperçus que sa présence me devenait indispensable. Puis ce fut le choc, le bouleversement, le renversement, comme un coup à l’estomac. Je dus prendre conscience que j’étais amoureuse de Jasmine, que sa présence allumait en moi une flamme, un feu dont j’ignorais l’existence. J’étais totalement paniquée. Non, je n’étais pas cela, je n’avais jamais été ça. Je n’étais pas lesbienne ! La semaine que je passai suite à cette ...