Le dernier des Grizziera
Datte: 10/02/2019,
... d’un nouveau-né, tout est déjà là. Ah ! Il se rappelait Léane et cet incroyable voyage qu’ils avaient fait ! Quelle histoire ! Il avait pu compter sur elle en ces moments difficiles. C’était quand déjà ? Il y a quinze ans, oui quinze ans déjà, elle l’avait retrouvé juste après l’enterrement de ses parents à Limoges. Curieux endroit ce Limoges. Un peu mort. Des embruns mouillèrent son visage tandis qu’il s’avançait sur la large promenade, passant sans même un regard devant le casino. Des surfeurs avaient déjà pris les vagues. Le soleil perlait depuis les hauts immeubles qui longeaient la plage. Il croisa un couple avec un bébé dans une poussette. Elle était brune, très brune, vaguement orientale, peut-être Libanaise. Ils le regardèrent tandis qu’il passait devant eux. Surtout lui, avec son air ahuri. Il avançait plus lentement maintenant, frappé par l’odeur de la mer, et qui se mêlait à celle des cafés qu’on tirait des machines. L’odeur du matin, ici à Biarritz. Après les pluies de la nuit dernière, le ciel s’était dégagé, ça allait être une belle journée. Il aimait ce temps changeant, l’un des plus instables de France. Ça lui allait. Il descendit sur la plage quasi déserte, passant devant deux surfeurs qui se préparaient. — C’est bien, les gars, vous allez vous amuser, c’est une belle journée, lança-t-il comme une pierre vers la ligne claire de l’horizon.— Merci, répondit l’un des deux, mais lequel, ils étaient aussi blonds, aussi grands, aussi souriants l’un que l’autre. ...
... Tu ne surfes pas, toi ? Il avait un vague accent anglais. — Non, non, je… Gabriel fixa quelque chose dans le ciel. C’était un cerf-volant d’un jaune très vif. Un losange parfait qui zébrait l’air avec grâce. — Tu quoi ?— Je suis là pour l’enterrement de mes parents.— Désolé. Et les yeux de celui qui avait parlé se fixèrent sur les pieds nus de Gabriel, puis sur sa tignasse épaisse et mal coiffée, puis sur cette barbe plus que naissante qui lui mangeait le visage. Puis sur ses yeux, ses yeux vides. — Ma copine va me rejoindre, il faudra que je me change les idées, on fera un voyage, un long et beau voyage, il faut que je bouge d’ici.— Ok mec, bon courage à toi. Et les deux gars ricanèrent en trottant vers la mer, planche sous le bras. Gabriel s’assit sur le sable. Dur et frais. Voilà, c’était bien. N’avait plus qu’à attendre qu’elle arrive. Peut-être aurait-il dû l’appeler ? Non, elle le connaissait bien, elle saurait où le trouver. C’était un moment important pour lui, l’enterrement de ses parents, c’était quelque chose quand même. Elle saurait où le trouver, il n’en doutait pas. Le soleil passa par-dessus les immeubles puis bientôt par-dessus ses épaules. Il jouait avec le sable, le passait d’une main à l’autre, le faisait glisser en petits tas sur le sol. La plage s’était remplie. Ça devait être samedi, mais il n’en était pas certain. Ni même du mois en fait. La mer lui faisait envie. La mer lui faisait peur. Le soleil le dépassa complètement, l’océan étincelait. Plusieurs ...