1. Natasha & Franck (24)


    Datte: 15/05/2019, Catégories: Transexuels

    Depuis le départ de l’ambulance, je n’avais que la chanson de Haim en tête. Right Now y tournait en boucle. Sigrid nous avait conduits, Kristina, Alexandra et moi à l’hôpital où Natasha avait été transférée. Le silence était oppressant dans la voiture, malgré cette foutue chanson qui se répandait dans chacune des circonvolutions de mon cerveau. Une seule personne pouvait entrer dans la chambre où elle était alitée. Dans la salle d’attente, les filles tournaient comme des lionnes en cage. J’attendais moi aussi, assis dans un fauteuil inconfortable, les premiers résultats de différentes analyses. Afin de détourner mon anxiété, je consultais sur mon téléphone différentes vidéos concernant Haim. Je restai bouche bée devant la ressemblance entre Danielle – la cadette de sœurs Haim – et Natasha. Il ne s’agissait pas d’une ressemblance trait pour trait, mais toutes les deux avaient cette silhouette fragile, cette délicatesse dans les expressions du visage et dans leurs traits. Je tombai sur une version live de Right Now qui me bouleversa encore plus que la version originale, ce que j’aurais pourtant cru inconcevable quelques heures auparavant. Je la passais en boucle, comme si cela pouvait aider Natasha à revenir à elle, à nous. Elle était inconsciente depuis son arrivée à l’hôpital et son cas laissait les médecins perplexes ; ils n’arrivaient pas à déterminer la cause de ses importants saignements. En un mot, ils pataugeaient totalement. Heureusement, l’hémorragie avait cessé. ...
    ... Pour l’instant Natasha ne semblait plus en danger. Elle était allongée et dormait d’un sommeil presque paisible. J’étais seul dans la chambre et trouvai étrange qu’il y eût un deuxième siège de l’autre côté du lit. Sur cette réflexion, je fermai un instant les yeux. D’épuisement, mais aussi pour m’aider à faire le point sur la situation. J’avais arrêté de compter combien de fois j’avais écouté la chanson : je l’écoutais tant que j’en perdais le fil du décompte. Un grésillement dans l’oreille ; je maudis l’écouteur de parasiter le son et de me ramener à des considérations bassement matérielles. Une rapide manipulation de la prise et le grésillement disparut. Je me laissai entraîner à nouveau dans le torrent crescendo de décibels et, alors que je savourais masochistement cette lame sonore qui me déchirait, le volume commença à décroître. J’ouvris les yeux pour regarder ce qui clochait. Quelqu’un avait éteint. Peut être une infirmière de passage pensant que je dormais. J’essayai de me remémorer où se trouvait l’interrupteur, tournant la tête de tous les côtés en espérant apercevoir une petite lueur m’indiquant où se trouvait le bouton magique. La porte de la chambre était sur ma gauche ; l’interrupteur devait donc être à proximité. Je me levai et cherchai à tâtons contre le mur. Le son de mon téléphone revint soudainement, ce qui me fit sursauter. J’entendis par-dessus la musique une respiration ; peut-être Natasha s’était-elle réveillée ? Non, il s’agissait d’une troisième ...
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