Le Pédoncule de l'enfer...
Datte: 21/06/2019,
Catégories:
jardin,
... mort sans qu’elle se soit développée ?— Oui. Ni développée, ni disparue d’ailleurs. Elle doit encore se trouver à la même place, cachée au milieu des herbes folles, dans la maison qu’habite encore ma mère. Quand je rentrerai, je vérifierai, mais quand je suis parti elle était toujours là— Alors, c’est qu’elle n’était pas pour lui.— Que veux-tu dire ?— Je pense que cette graine ne pousse pas par hasard. Si elle a fait son apparition dans le jardin de ton père, ce n’est pas fortuit.— Je ne comprends pas.— Viens avec moi. Après avoir parcouru à pieds environ deux cents mètres, ils pénétrèrent dans un immense jardin. Le long des allées apparemment dessinées sans aucun plan d’ensemble, poussaient des plantes et des fleurs de toutes les couleurs possibles et imaginables. Julien qui, par son père s’y connaissait un peu, ne reconnut dans cet univers végétal, aucune espèce connue. La luxuriance de cet enchevêtrement de verdure, de ces motifs bigarrés, ne faisait pourtant pas du tout désordre mais inspirait au contraire au promeneur un sentiment d’harmonie apaisante, une impression de calme, de détente, qu’accentuait encore le mélange subtil de parfums délicats. Magnifique ! Abasourdi, le jeune homme ne savait plus où poser les yeux. — C’est incroyable, dit-il. Il semblerait que ce jardin ne soit pas entretenu tellement il est dense et touffu. Et pourtant, je ne distingue aucun signe de désordre, aucune herbe sauvage, aucun signe de laisser-aller… Comment faites-vous pour parvenir à ...
... ce résultat ?— Je ne fais rien.— Comment cela vous ne faites rien ? Pardon… Je voulais dire… Mon père passait des heures à nettoyer ses plates-bandes, à éradiquer les mauvaises herbes…— Sans doute. Mais ce jardin s’est construit et s’entretient… tout seul.— C’est impossible ! Cela paraît irréel… Et de plus, je ne vois pas le… Pédoncule de l’enfer ?— S’il te plaît, ne l’appelle plus ainsi ! Ton père ne savait pas ; mais toi, maintenant tu as vu. Cette graine, cette graine rare dont tu m’as parlé, c’est elle le jardinier, l’artisan de ce chef-d’œuvre. Elle EST ce jardin ! Tout ce que tu vois ici, c’est ELLE ! De retour en Europe, Julien retrouva son travail à l’université, sa maison, ses amis. Sa mère le trouva changé. Plus calme, plus posé. Elle le lui dit. — Toi, tu as dû apprendre et découvrir pas mal de choses, lui dit elle.— Oui, c’est vrai. J’ai beaucoup appris, répondit- il Aujourd’hui à la retraite, Julien, à la mort de sa mère, a gardé la maison où il habite encore. Le « Pédoncule de l’enfer » est sorti de sa gangue et chaque jour il donne naissance à une nouvelle plante inconnue. Le jardin de son père se reconstitue lentement, tout seul… Tout seul ? ------------------@------------------ J’ai tenté d’écrire cette courte nouvelle "à la manière de" Dino Buzzati dont les merveilleux contes du « K », pleins de symboles poétiques et universels, continuent de m’accompagner. Ils ont développé en moi leurs ramures comme les branches et les fleurs de ce jardin extraordinaire que ...