Les lundis de Cendrillon, ou le grand théâtre du désir (1)
Datte: 03/07/2019,
Catégories:
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... mes anciens élèves ? C’est absurde, impossible… — Mais enfin, je n’ai jamais joué, je vous l’ai souvent dit, j’en suis bien incapable…— Nous non plus, nous n’avions jamais joué, Madame, et nous en avons été capables, tout le monde le reconnaît, non ?— Franck, je suis très touchée par votre proposition, mais c’est vraiment impossible. Je n’ai ni le temps, ni les capacités pour…— S’il vous plaît, Madame, réfléchissez-y, ne me dites pas non comme ça !— Franck, je suis vraiment désolée de vous faire une déception, mais je ne peux pas ! Il me regarda alors comme il ne m’avait jamais regardée jusque-là. Ce n’était plus du tout le regard d’un élève tenu à distance, mais le regard à la fois perçant et lourd d’un homme qui voulait me faire sentir quelque chose de crucial : — Si vous me dites non, Madame, alors j’arrête tout, j’arrête d’écrire ma pièce. Car ma pièce n’a été écrite que pour vous ! J’ouvris la bouche, mais je demeurai un long moment sans voix – et sans doute l’air un peu idiot ! Je finis quand même par bégayer : « Mais, c’est tout de même un peu… surprenant, non ? Je ne m’attendais pas… C’est un peu rapide. Laissez-moi un peu de temps, j’ai besoin de réfléchir à tête reposée, d’en discuter avec mon mari… — Je vous en prie, oui, réfléchissez, et dites-moi oui. Ne vous faites pas de souci pour le temps. Deux heures par semaine de répétition suffiront, nous ne sommes pas pressés pour la représentation… Les répétitions pourront se faire chez moi. J’en ai parlé à tous les ...
... autres, Cherifa, Hélène, et aussi un autre ami à moi, qui veut être de la partie… Tout le projet repose sur vous. Si vous le refusez, tout tombe à l’eau…— Mais c’est un affreux chantage ! répondis-je, sans pouvoir m’empêcher de sourire. Ce n’est pas très loyal de me confier une telle responsabilité. Ecoutez, je vous promets d’y réfléchir. Je vous donnerai ma réponse avant les grandes vacances, pour vous permettre de vous retourner en cas de refus. Il ne me répondit pas, se contenta de me regarder avec des yeux curieusement fixes et implorants… Voyant qu’il restait debout dans le couloir, et m’apprêtant à retourner dans la salle rejoindre tous les autres, je lui posai une dernière question à la volée : « Au fait, avez-vous déjà trouvé le titre de votre pièce ? » — Oui, le titre sera anglais. Cela s’appellera « What’s on a man’s mind ».— Curieux titre… A bientôt, donc. « What’s on a man’s mind », « What’s on a man’s mind », autrement dit : « Ce qu’il y a dans l’esprit d’un homme »… me répétais-je à moi-même en retournant parmi le public, c’est curieux, cela me rappelait quelque chose, mais je ne savais plus trop quoi « Ça te dit quelque chose, Frédéric, cette phrase ? » — Mais bien sûr, que cela me rappelle quelque chose, répondit aussitôt mon mari. Ça va te revenir : c’est un fameux dessin de Freud, que tu as du voir mille fois en poster. Il repose sur une illusion d’optique. C’est d’une part le portrait du psychanalyste, de profil ; mais en fait le visage est tout entier formé ...