1. Le voleur d'âmes


    Datte: 09/10/2019, Catégories: nonéro,

    ... monde, ajouta-t-il d’une voix sèche. Je suppose que vous ne travaillez pas parce que vous vous ennuyez à la maison ! Elle tressaillit, mais ne releva pas. – Vous écrivez beaucoup de livres par an ? continua Liana, s’obstinant dans son propre interrogatoire. Il semblait le plus souvent s’amuser de son manège, parfois seulement, s’en irriter. Cette fois, il plongea ses yeux dans les siens, un long moment, avant de sortir une cigarette du paquet. – Écoutez, monsieur, je préférerais que vous ne fumiez pas, intervint immédiatement Liana. Il suspendit son geste, la regarda à nouveau, l’œil impassible. – Ah oui, c’est vrai, vous avez horreur de ça, laissa-t-il tomber d’un air indifférent. Il rangea la cigarette. Elle se sentit inexplicablement gênée. C’est ce moment-là que le serveur choisit pour leur apporter leur café. Ils le remercièrent distraitement. M. Tomaze semblait nerveux. – Ne croyez pas que je veuille vous ennuyer volontairement avec ça, expliqua-t-elle. C’est que j’ai fumé pendant longtemps et que j’essaie d’arrêter. Son interlocuteur sembla se détendre imperceptiblement et il la fixa, intrigué. – Vous avez arrêté depuis quand ? – Oh, quelques mois seulement. Peut-être cinq, je ne sais plus. Mais voilà, je ne voudrais pas rechuter, et si vous fumez devant moi… Vous comprenez ? – Bien entendu, je comprends, assura M. Tomaze avec un sourire poli. Je ne sais pas comment vous faites, moi, j’essaie d’arrêter depuis dix ans, pas moins. – C’est comme l’alcool, avança Liana. ...
    ... Une fois qu’on a décidé d’arrêter, il ne faut plus y retoucher… Ce sont des drogues, et comme toutes les drogues, elles créent une dépendance… L’écrivain sembla se refroidir et ses yeux brillèrent bizarrement, tandis qu’il l’écoutait parler. Mais il ne dit rien et but la moitié de son café d’une traite. Liana tournait sa cuiller dans sa tasse, sans jamais s’arrêter. Elle paraissait perdue dans la contemplation du liquide brun encore fumant. – Alors ? reprit-elle. Combien de livres ? Le semi-géant baissa sur elle un regard pesant. – Vous avez bonne mémoire, remarqua-t-il. Vous ne perdez pas facilement le fil de la conversation. – Hum, ça vous étonne ? Mais peut-être, me prenez-vous pour une niaise qui ignore ce qu’elle dit ? Ou peut-être, me croyez-vous assez stupide pour avaler tout ce que vous me dites sans chercher à comprendre ? Encore une fois décontenancé, il la regarda avec hébétude. – Pourquoi êtes-vous si susceptible ? demanda-t-il lentement. Elle se mordit les lèvres et détourna les yeux. Elle se traita elle-même d’idiote de s’emporter ainsi pour trois fois rien. Mais être assise en face de cet homme et être obligée de soutenir une conversation avec lui, tout en étant contrainte de passer sous le grill de son regard, était une chose tellement insupportable ! Elle ignorait elle-même pourquoi la présence de cet inconnu à la taille imposante la rendait si nerveuse… – Je vous demande une fois de plus de m’excuser, dit-elle d’une voix mortifiée. Je vous assure que je ne me ...
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