1. Médecin dans une prison de femmes (III)


    Datte: 01/10/2017, Catégories: h, jeunes, médical, religion, complexe, vacances, noculotte, photofilm, init, nonéro,

    ... j’eus la nausée, je m’enfuis en courant vers la maison. Chaque soir, jusqu’à la fin des vacances, la vision de ces femmes nues et joyeuses hanta mes nuits et mes moments de solitude, et, chaque fois, sur ces images de paradis sensuel, venait se superposer la petite photo, la tache noire et informe, et chaque fois la bête me mangeait la poitrine. Je n’en avais parlé à personne, pas même à mes cousins. Chaque jour, plusieurs fois par jour, je passais devant l’appentis, en vain, jamais la porte ne fut à nouveau laissée ouverte. L’été prit fin et ce fut le retour à la Maison, la rentrée à la pension des Rosiers. J’y suis revenu bien plus tard, la Maison était en vente, les Oncles et les Tantes n’ayant jamais pu s’entendre. J’ai garé ma voiture devant la masure du gardien, elle était en ruine, mon cœur battait. Mais de l’appentis mystérieux, il ne restait qu’un tas de débris calcinés, un enchevêtrement de formes noires et indistinctes. À l’aide d’un bâton, j’ai tenté de soulever cette masse collante. Avec quel espoir ? Celui de revoir ma sirène bistre avec ses bras déployés comme les ailes d’un ange ? Celui de sentir à nouveau la puissance fabuleuse de mon premier émoi ? Sans doute ! J’ai jeté le bâton qui, en se plantant à mes pieds, souleva une fine couche de ce mille-feuille gluant, d’où je vis distinctement apparaître le coin calciné d’une petite photo crénelée, en noir et blanc, une image sur laquelle on pouvait encore distinguer une main qui semblait saluer le néant, ...
    ... comme un signe figé dans l’éternité… L’année, qui suivit ces vacances, était celle de la communion solennelle, la pension des Rosiers, institution catholique, donnait chaque année une pompe particulière à cette cérémonie, la transformant en une grand-messe de l’élite, glorifiant le culte de la réussite et de la position sociale. Cette année-là, la semaine de retraite spirituelle à laquelle nous étions contraints pour purifier nos âmes avant de nous présenter devant l’autel, était animée par le Père Jacques De M…, missionnaire Dominicain à Lambaréné au Cameroun. Le Père Jacques De M… était un homme puissant, barbu comme seuls peuvent l’être les ogres dans les contes ; il promenait avec vigueur sa soutane blanche dans les gradins du petit amphithéâtre qui accueillait notre retraite. En Afrique, il pourchassait le démon jusqu’au cœur de la forêt vierge, ses histoires étaient pleines de Marabouts, de fétiches et de rites initiatiques. Il avait déposé sur le bureau du magister des statues impies qui représentaient des femmes noires, avec des seins en pain de sucre et de drôles de fentes là où je savais – par mon expérience de vacances - qu’il n’y avait rien que de la peau lisse comme le ventre. Le Père faisait un parallèle entre ses Africains animistes et fétichistes et la jungle des turpitudes dans laquelle nous ne devions jamais nous engager. Les turpitudes ! Il n’avait que ce mot à la bouche, même après en avoir lu la définition dans le dictionnaire, nous comprenions mal la ...
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