1. Saint Matthieu et l'ange


    Datte: 27/09/2020, Catégories: fh, hplusag, religion, Collègues / Travail revede, pénétratio,

    ... vont exploser. Le pire, c’est que j’y suis habitué. Alors je sors le flacon d’huile de ma poche et en verse quelques gouttes dans ma paume, sans réfléchir. Le parfum embaume la pièce. Puis je frotte mes mains l’une contre l’autre et passe mon pouce dans chacune d’elle. Sans réfléchir. Quand je pose mes mains à plat contre ses tempes, ses yeux se ferment. Je le fais spontanément. Sans me dire que c’est mal ou bien. Mes pouces tracent une ligne sur son front. — C’est exactement comme ça que me massait ma grand-mère quand j’avais ces douleurs-là, mais avec un produit qui sentait davantage le camphre. D’ailleurs, je sentais le camphre pendant des jours après ça. Ma mère, elle, préférait le paracétamol. Je lui dis ça comme pour légitimer ma manœuvre. Je reste dans cette position un moment. Il ne bouge pas non plus. Il ne bronche pas. Parfois, ses paupières se crispent et il respire plus fort, puis il redevient immobile. La migraine opère par vagues, comme des contractions. Certains diraient qu’elle intervient pour évacuer un grand conflit avec soi-même. Je ne sais pas si je suis d’accord ou pas. Je n’y ai jamais réfléchi. Pourquoi pas ? Finalement, j’ôte mes mains. Je me suis enfin habituée à l’obscurité. Ses yeux s’ouvrent. Humides, larmoyants, encore plus bleus que d’ordinaire. Vraiment trop bleus. Il ne se passe rien. J’entends mon cœur battre dans ma tête et ma gorge, comme la grosse caisse d’un mauvais orchestre de village. Il s’approche de moi. — Qu’est-ce qu’on disait, ...
    ... hier, sur la clôture ? Je n’en sais rien, moi. D’ailleurs je ne sais plus rien du tout, à part que son visage est campé à cinq centimètres du mien, que mon estomac est dur comme une pierre et que mon bas-ventre prend feu. Je creuse ma cervelle à grands coups de pioche. — Je crois, Jean-Baptiste, qu’on a dit que les lois de la clôture s’effaçaient devant les lois de la nature. J’ai lâché ça dans un souffle avant que sa bouche ne fonde sur la mienne. Il se lève et m’emporte avec lui. Mes mains sont dans ses cheveux. C’est animal : j’aurais envie de le bouffer. Mon cœur va éclater. Sa langue est contre la mienne. Un mouvement partagé nous entraîne un ou deux pas en arrière. Je m’appuie sur le bureau. Il recule, un instant, une fraction de secondes, et j’ai le temps de voir briller dans ses yeux tout, tout, tout sauf de la sainteté. Puis ses lèvres reviennent contre les miennes. Et il prend le temps. Et je pourrais presque jouir rien qu’à me dire que je suis passée outre toute ma culpabilité judéo-chrétienne ancrée, et que c’est tellement bon. Le baiser dure longtemps. Assez longtemps pour que je m’habitue à la présence de ses mains sur ma taille, au goût de sa langue et à son parfum, où se mêlent peut-être menthe, savon, sueur, et je ne dirais pas « un peu d’encens », sinon je culpabiliserais. Soudain, on frappe à la porte. Il sursaute et je me pétrifie. Il n’est pas difficile de cerner ce que peut imaginer frère Pacôme à ce moment précis, son bol fumant à la main, en nous trouvant ...
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