13, avenue Volvestre - Histoires de Sexe

13, avenue Volvestre

... acteur.— Vous semblez pourtant éloquent et vous présentez bien.— Merci, mais devant une caméra, je perds tous mes moyens. Je suis incapable de dire deux mots sans bafouiller. Les réalisateurs, jusqu’à présent, ne s’en sont guère souciés et m’ont cantonné à des rôles muets ou presque.— Muets ! Le cinéma muet n’a donc pas disparu ?— Si, répondit Fred en souriant. Mais je dois vous avouer que je suis recruté essentiellement grâce à mon physique. Jusqu’à récemment, mon incompétence ne gênait pas les réalisateurs qui trouvaient toujours une façon de contourner le problème. Mais la concurrence est féroce et les lois du genre commencent à évoluer. De plus en plus de films sont scénarisés et on demande aux acteurs de jouer un rôle, d’apprendre un texte.— J’avoue que j’ai un peu de mal à vous suivre. Ce que vous me dites me semble tout à fait naturel. Évidemment, les acteurs doivent jouer un rôle. Ça ne me semble pas révolutionnaire.— Je n’ai peut-être pas été très clair : je suis acteur de films X.— Pardon ?— De films à caractère pornographique, Madame, précisa Fred en regardant par terre. Elle hésita un instant. Lorsqu’elle réalisa l’ampleur du quiproquo, elle se sentit complètement idiote et son visage s’empourpra d’un coup alors qu’elle détaillait son interlocuteur de la tête aux pieds pour la première fois. Comment avait-elle pu être aussi bête ? Mais surtout, comment ce jeune garçon, élégant, poli, avenant, avait-il pu sombrer dans ce milieu que Diane assimilait avant tout à ...

... celui de la prostitution ? Ne sachant plus où se mettre, elle éclata d’un fou rire nerveux. Même si la situation n’avait rien de comique, Diane avait besoin de relâcher la pression et rire aux éclats était la seule échappatoire qui lui semblait accessible, quitte à vexer son jeune invité. Et c’était si bon de rire. Il lui semblait qu’elle n’avait pas ri ainsi depuis des années. Elle en avait les larmes aux yeux et ne pouvait plus s’arrêter. Fred le prit mal et se leva : — Je suis désolé, Madame Fargue. Je ne sais pas pourquoi j’ai pensé que vous accepteriez de m’aider. C’est ridicule ; il vaut mieux que je m’en aille.— Non, je vous en prie, reprit Diane, légèrement embarrassée et en essayant de se contrôler. Je vous prie de m’excuser. C’est nerveux. N’y voyez rien de personnel. Asseyez-vous, jeune homme. Puis-je vous offrir quelque chose ? J’ai du café qui est déjà prêt.— D’accord, répondit Fred en se rasseyant. Même si m’offrir un café est la seule chose que vous pouvez faire pour moi, ça aura déjà été un grand honneur que de pouvoir vous rencontrer et échanger ces quelques mots avec vous.— Ne soyez pas idiot, Frédéric, je ne vois pas en quoi je peux vous être utile mais loin de moi l’idée de me moquer de vous. Je ne peux pas dire que j’approuve l’industrie pour laquelle vous travaillez, mais je n’ai pas souvent de visite et je ne veux pas que le petit monde de la pornographie s’imagine que Diane Fargue ne sait pas prendre soin de ses invités.— N’ayez aucune crainte, Diane, je ...