Dans la nécropole des Taureaux Apis
Datte: 29/06/2017,
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... Six-Jours. Ce qui montre que dans l’Égypte d’aujourd’hui, la vie et la mort s’entremêlent toujours comme au temps des Pharaons. La vie et la mort : nous étions la vie, Nofret et Rahotep étaient la mort, et nous cohabitions ensemble, tout comme les vivants d’aujourd’hui avaient phagocyté les tombes des anciens, nos hôtes avaient élu domicile au creux de nos sens. Depuis cette matinée extraordinaire au musée du Caire, le cours de notre vie avait changé. Nofret et Rahotep, qui avaient partagé un amour si grand qu’ils avaient réussi à lui conférer l’éternité, nous apprenaient combien sont courtes les heures qui nous séparent du dernier jour, combien sont futiles les déchirures d’amour-propre, les conflits ridicules pour un tube de dentifrice mal rebouché ou la volonté d’avoir raison à tout prix. Nous ressentions au fond de nous-mêmes toute la puissance de leur amour et comprenions que, loin de nous nuire, cette force nous servait. Cette large avenue, que notre autobus parcourait à tombereau ouvert, était grouillante d’une vie qui débordait des trottoirs sur la route, une humanité souriante et bigarrée qui ne semblait pas incommodée par la fureur de la circulation. Aucune harmonie ici, tout n’est que désordre, rien n’est fini, rien ne paraît sérieux. Nous aperçûmes, par-dessus le parapet d’un grand pont, un bout de la peau du Nil qui se perdait dans la ville ; puis notre bus s’engagea dans une immense avenue bordée d’immeubles tristes : Pyramides road, (sharia al Arham notais-je ...
... d’après la prononciation de Mme Guirguiss), nous nous penchions tous pour voir naître à l’horizon les triangles magiques, mais la forêt urbaine cachait les monuments de l’empire disparu. Ce ne fut que lorsque l’autobus s’engagea vers un autre itinéraire que nous aperçûmes cette image rarement vue de la 7e merveille du monde sertie dans la verdure. Saqqarah était notre destination. Très vite, la ville lâcha prise et apparurent, entre les immeubles, des taches de verdure, puis des champs, puis des palmeraies. Nous eûmes le sentiment que le temps s’était arrêté ; devant nos yeux et le cliquetis frénétique de nos caméras, la route courait le long d’un canal, des champs s’étendaient à perte de vue, un bœuf actionnait une noria qui puisait l’eau vers les parcelles de terre grasse, des paysans étaient courbés sur leur labeur. Rahotep ressentait mes impressions et me parlait de ses champs quand, après la saison de l’Akhet consacrée aux travaux de Pharaon, arrivait celle de Choumou qui apportait les chaleurs et les moissons du mois de Mesore, qui, si elles étaient bonnes, donnaient lieu à de grandes réjouissances populaires et des processions vers les temples. Il me parlait des paysans dont les sens étaient exacerbés par la récolte du chanvre, et que Nofret convoquait par groupes de huit ou dix dans les huttes de paille réservées aux scribes. Elle aimait les corps musclés, souillés de terre et encore mouillés de transpiration des hommes et des femmes de leur domaine, simplement vêtus ...