1. 0202 Colère, regrets, remords, coup de fil et vent d’Autan.


    Datte: 04/11/2017, Catégories: Entre-nous, Les hommes,

    ... de lui qu’il n’arrive pas à assumer, surtout en ce moment où il a besoin de toute son énergie pour se lancer dans l’aventure du rugby pro parisien. Renoncer à celui qu’on aime, c’est très dur : pourtant, il y a dans le renoncement comme une forme de soulagement, comme un dernier rempart contre une souffrance insupportable, pour l’empêcher de nous rendre fous. Ce matin, contrairement aux jours précédents, j’ai envie d’aller courir sur le Canal. Non pas que mon humeur se soit vraiment améliorée, c’est surtout que je n’en peux plus de rester enfermé entre les quatre murs de ma chambre, allongé sur mon lit : mon corps étouffe, il réclame, exige de l’activité physique. Mais alors que je m’apprête à quitter la maison, le ciel est toujours gris, le vent d’Autan toujours aussi mordant, et mon moral tout autant dans mes chaussettes. « Nico, tu penses à rassembler les papiers pour la visite de samedi ? ». « Oui maman, j’y pense… ». Comment je pourrais oublier ces quelques papiers à réunir, ce premier pas vers ma nouvelle vie, cette virée à Bordeaux pour signer les papiers de mon futur studio ? Maman me demande à quelle heure je vais rentrer. Je regarde mon téléphone, il affiche 10h13. Je lui réponds que je serai de retour avant midi. A cet instant précis, j’ignore encore à quel point cette journée va être riche en événements ; qu’avant la fin de l’après-midi, mon état d’esprit va changer de façon plutôt radicale ; et, surtout, à cet instant précis, je suis à mille années-lumière ...
    ... d’imaginer que, dans 8 heures et 12 minutes exactement, à 18h25, un événement inattendu et bouleversant va définitivement me secouer de ma torpeur, de ma morosité, de ma rancœur. Mais revenons aux faits, dans l’ordre naturel où ils se sont déroulés en cette journée si particulière du jeudi 06 septembre 2001. Sur le Canal, il n’y a pas grand monde : la rentrée est bien là, la plupart des Toulousains ont repris le travail. Pendant de longs moments, j’ai carrément l’impression d’être seul avec les platanes, seul avec l’eau en contrebas, et avec les quelques péniches ; une sensation qui s’accentue encore lorsque les immeubles de la ville laissent progressivement la place aux résidences, puis à des maisons, puis à un paysage plus campagnard ; lorsque le bruit de la circulation se fait de plus en plus faible, de plus en plus éloigné, et que peu à peu le bruit des feuillages caressés par le vent devient le seul à accompagner mes foulées. Ce matin, je n’ai même pas pris mon baladeur mp3 : je suis parti dans la précipitation, comme si j’avais été longtemps la tête sous l’eau et qu’il y avait urgence vitale à remonter au plus vite à la surface. Au fil de l’activité physique, je sens que le mouvement procure une sensation de bien-être d’abord dans le corps, puis dans l’esprit. Platane après platane, je sens mes poumons se remplir et se vider, de plus en plus profondément ; comme si mon corps était en train de se nettoyer, de se réveiller d’une longue léthargie ; peu à peu, je sens mes muscles ...
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