L'harmonique des corps
Datte: 16/07/2021,
Catégories:
fh,
jeunes,
amour,
Oral
pénétratio,
journal,
nostalgie,
1990, c’est ma troisième année aux Beaux-arts. Un choix débile de ma part m’a fait prendre dans mes études une orientation que je finirai par regretter. Que je finirai ! Car sur le coup, je n’ai pas l’honnêteté de me rendre à l’évidence et passe mon temps non seulement à me morfondre, mais surtout à me mentir, au grand désarroi de mes amis qui ne savent plus vraiment comment me prendre. De plus, peu de temps avant cette nouvelle décennie, ma petite amie avait décidé, en complet accord avec elle-même, de mettre fin à notre relation. Motif : trop chiant, trop exigeant. Elle aurait pu aussi ajouter ; prétentieux, hautain, p’tit con, gros con, lourd, pesant et j’en passe. D’entrée de jeu donc, cette année semblait me glisser entre les doigts. Un projet commun qui passe à la trappe pour d’obscures raisons, mon groupe d’amis qui se scinde, et surtout cette orientation qui crée une rupture avec mes deux premières années pendant lesquelles, tout n’avait été qu’un long fleuve tranquille, riche de rencontres et d’expériences. Là, tout me paraissait incertain, voire inquiétant. Je finissais 1989 par un réveillon pathétique, seul, dans mon F1 en centre-ville. Accompagné d’une bouteille de vodka et de jus d’orange, je comptais m’enivrer avant de sortir en ville dans l’espoir de me mêler à la foule, d’attraper un train. Il y avait bien du monde à minuit sur la place d’Erlon, mais personne avec qui repartir. En désespoir de cause, je tentai de communiquer avec un clochard que je croisai sur ...
... ma route, mais peine perdue. Je ne comprenais qu’un mot sur dix qui sortait de sa bouche encore plus avinée que la mienne. Dépité devant ce manque de compassion de la part de mes concitoyens, je rentrai chez moi en zigzaguant pour enterrer les années 80 et espérer le meilleur pour la suite. Des mois qui suivirent, j’ai très peu de bons souvenirs. Je me revois surtout tirant la gueule dans mon appart en compagnie de mes potes. La déprime totale. Je suis même absent des discussions de groupe. En fait, je ne me sens bien qu’avec Laurent D, mon meilleur ami. Je traîne ma peine comme un boulet et ne me remets pas de ma rupture. Cette plaie à vif en masque d’autres plus sournoises et plus profondes. Et puis, le printemps. C’est en cours de croquis que j’aperçois Sophie pour la première fois, à quelques mètres de moi, planquée derrière un carton à dessin trop grand pour elle. Elle a le sourire timide et une légère pointe de tristesse dans le regard. Brune, les cheveux longs, elle mesure 1,50 m tout juste et s’habille de vêtements amples qui ne permettent pas de se faire une idée de sa silhouette. Mais peu m’importe. Son langage-corps m’interpelle, me séduit. À quelques mètres de moi seulement. Si proche et si loin à la fois, je ne sais comment l’aborder. Et avant la fin du cours, je me résigne déjà à l’oublier. Et puis, quelques jours plus tard, la chance me sourit. C’est la fin de journée et, sur les marches du hall d’entrée, elle est là, assise à côté d’une fille de ma classe que ...