1. Tranche de vie


    Datte: 15/08/2021, Catégories: romance, fh, couple, voisins, amour, Voyeur / Exhib / Nudisme

    1er mai Je me suis levé sans grand enthousiasme. Ça arrive, même à des gens bien ! Ciel gris, bas, petite pluie fine. Le premier tableau de la journée a un décor peu séduisant. Coup de chance, il ne fait ni trop chaud, ni trop froid. De ma fenêtre je vois au-delà des toits gris de la capitale le monstrueux gâteau à la crème du Sacré-Cœur presque écœurant à force de blancheur, énorme verrue livide sur la peau grise des toits de Paris. Plus loin, sur ma gauche, la Tour Eiffel se devine un peu dans la grisaille. Fenêtre ouverte, je me laisse envahir par les bruits et les odeurs de ma rue. Les cinq étages en-dessous de mon appartement servent de filtres et ne me parviennent que les éléments forts. L’odeur de « mouillé » froid, triste, plate, sans aucune animalité, complètement minérale. Avec quand même une petite touche de « je ne sais quoi » qui laisse penser qu’en bas, quelque chose vit. Peut-être celle des arbres du jardin de l’immeuble ? Les trois marronniers presque centenaires plantés en triangle sur la pelouse carrée et rachitique, encadrée de massifs de troènes et de thuyas, dégagent une odeur de poussière mouillée, froide elle aussi. Il est trop tôt pour avoir les odeurs de cuisine des autres copropriétaires ou du restaurant qui occupe le rez-de-chaussée de l’immeuble voisin. Ce matin, je trouve mon quartier triste. Un léger bruit à ma droite me fait tourner la tête. Le chat de mon voisin contourne délicatement la jardinière posée devant la porte-fenêtre et, oreilles ...
    ... aux aguets, examine lui aussi les environs. Il me voit ; ses yeux se ferment, il tourne la tête de l’autre côté. Les relations que nous avons tous les deux sont calquées sur celles que son maître et moi avons établies. Courtoisement indifférentes. Il (le chat) est venu me voir le jour de mon emménagement, a fait le tour de mon appartement, a flairé les cartons, s’est frotté aux meubles, s’est assis sur le tapis pour me regarder ranger mes disques. Il a poliment miaulé lorsque je l’ai appelé « Le chat… Bonjour, viens me voir. » mais s’est esquivé et a rejoint son « chez lui » par la fenêtre et le balcon dès que j’ai fait mine de vouloir le caresser. Depuis, il promène ses 4 kg de muscles et de poils gris rayés au gré de ses envies, me salue d’un regard vert et indifférent. Il n’est plus revenu dans l’appartement. Son maître a eu à peu près le même comportement. Je montais un de mes derniers cartons, et il attendait l’ascenseur pour rejoindre le rez-de-chaussée. Il m’a tenu la porte ouverte. Nous nous sommes salués, il s’est présenté : — Robert Petit, instituteur en retraite.— Michel Cartier, bonjour ! dis-je en donnant le coup de reins indispensable à l’arrachement des quinze kilos de bouquins qui me tiraient les bras. Depuis cette rencontre, il y a quatre mois, je ne l’ai croisé qu’une fois. À peu près dans les mêmes circonstances. Il revenait du marché avec son cabas d’où dépassaient le vert d’une botte de blettes et l’or brun d’une baguette de pain, je descendais chercher mes ...
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