Les vieux messieurs indignes...
Datte: 16/11/2017,
Catégories:
prost,
init,
méthode,
Ils sont légions à afficher leur bonhomie, leurs décorations arborées fièrement à la boutonnière et la placidité de leurs pas tranquilles sous les platanes ou les tilleuls des places de nos villages, à l’heure où le pastis rafraîchit les verres d’une buée blanchâtre et où les cigales recommencent à chanter. Ils ? Ce sont ces vieux messieurs, dignes d’une reconnaissance éternelle due à tous les héros des temps anciens et modernes. Aujourd’hui, ils se prélassent, chauffent leur peau parcheminée au soleil de l’après-midi et, d’une voix chevrotante, commentent l’actualité en faisant d’impossibles comparatifs avec leur temps, s’emportant ou s’empourprant à la moindre contrariété ou contradiction… Certains, la majorité d’entre eux, se complaisent dans leur monde, irréel et inchangé, bousculés qu’ils sont par la modernité de la réalité qui les submerge. Pourtant, bon nombre d’entre eux étaient, il y a encore peu de temps, en activité. Employés de bureau, chefs de service, contremaîtres de manufacture, responsables d’hommes et de femmes, ils ont fait et participé à la grandeur de leur pays, à sa construction, à son renom. Le propos doit vous paraître bien amer, peu conventionnel, politiquement incorrect ! C’est qu’à force de fréquenter les vieux messieurs dignes, j’ai aussi découvert la face sombre de leurs personnes. Toujours bien mis sur eux, la canne élégante, la cravate souvent assortie à la pochette, la bottine cirée, le pantalon lustré aux genoux à force de frotter leurs bras ...
... dessus, ils s’assemblent dans l’ombre fraîche du couvert pour deviser des choses du temps, refaire le monde selon leur vision passéiste. L’œil humide, ils ne perdent pas une miette de ce qui se passe autour d’eux. Ils vitupèrent contre ces garnements d’adolescents qui font pétarader leurs motocyclettes et parasitent leurs sonotones, mais suivent d’un regard concupiscent la jeune beurette qui traverse court vêtue la placette pour les rejoindre et, dans un long regard égrillard, ils admirent ses seins, qu’ils trouvent arrogants, puis suivent sa chute de rein et le modelé des cuisses, qui éveillent en eux quelques réminiscences, uniques restes d’une constitution mâle aux gestes brusques, aux mœurs plus que douteuses. Ce regard lubrique qu’ils jettent sur le monde qui les entoure est bien souvent le seul et dernier souvenir d’une vie mâle, bien remplie et menée à entretenir des us et coutumes, considérés aujourd’hui d’un autre âge mais qui firent les beaux jours de leur temps. De cette époque, pas si lointaine, il est certains que du sexe et de la vie sexuelle on en parlait beaucoup moins, pour ne pas dire pas du tout, mais on faisait la chose avec plus de liberté et de libertinage qu’en ces temps dits « modernes aux mœurs dissolues ». Et voilà que nos vieux messieurs dignes qui s’agitent frénétiquement sur leurs bancs de pierre, à l’ombre de nos places publiques, maugréant qu’ils n’ont pas eu une jeunesse dorée, eux, et de se trouver pour toute excuse qu’ils ont connu la guerre, ...