1. Où sont passés les poivrons jaunes ?


    Datte: 19/06/2017, Catégories: caférestau, nonéro, amiamour, consoler,

    ... jusque dans mon verre, résonnent dans la tranquillité incolore de cette triste nuit. Assise sur un des fauteuils de jardin, je porte l’alcool à mes lèvres, savourant, me délectant. Quelques rares bagnoles qui s’essoufflent au feu, en bas, le claquement régulier de la porte du bistrot, un peu plus loin en amont de la rue. De temps en temps en sortent des rires, des bribes de conversations et de musique. Un désespoir du genre à tomber jusqu’au cul de la bouteille s’abat sur moi, me submerge, je vais bientôt me noyer dedans. Et en parlant de bouteille… je me ressers un verre, tiens. Putain de souvenirs. Raconte-moi, compatit la bouteille. Non. Allez, raconte-moi. Tu en meurs d’envie. Pas vraiment. Ça fait mal. Oui, approuve la bouteille, insondable.Mais tu sais bien que tu dois repenser à tout. Pour te sortir de ce merdier. D’accord… Je cède. Chère bouteille, tu m’étouffes de ta bonté. C’était en juillet. Les copains avaient décidé de finir la soirée d’anniversaire de Fabrice en boîte. La boîte, pfff, très peu pour moi. S’entasser sur la piste en essayant vainement de se dandiner sur du rythme sans queue ni tête – ouais, ils appellent ça de la musique… enfin bref. Je disais donc, se serrer là-dedans en faisant semblant de s’amuser, et dans le même temps, mater discrètement toutes les cinq minutes ses aisselles, histoire de vérifier que la transpiration ne trempe pas le chemisier… quel intérêt ? Dans le genre « conversation » qui tourne en rond, moi, Fabrice, et le bruit du ...
    ... moteur de la bagnole : — Pourquoi t’aimes pas danser ?— Non mais, j’aime danser, arrête…— T’aimes pas danser.— Mais arrête, je te dis ! Tellement affirmatif et sûr de toi, là… Bordel on l’a eue combien de fois cette discussion ?— Mais tu ne veux JAMAIS venir ! C’est mon anniversaire, tu pourrais… Je ne sais pas. T’amuser un peu ?— Woah, c’est bon, on a trente ans, c’est pas comme si j’avais encore de l’acné sur le visage ou des complexes sur mes petits seins d’ado… lâche-moi un peu, Fabrice, tu deviens chiant. Pause. Fabrice a regardé la route, une ride plissant son front. — Pourquoi tu me parles de tes nibards ? a-t-il rétorqué.— Mais je te parle pas de mes nibards ! Je t’explique qu’on est peut-être un peu vieux pour ce genre de truc ! En tout cas, moi, ça n’a jamais fait partie de mes loisirs. Même ado.— Tu sais ce que c’est ton problème ? Hein ? Pourquoi tu réponds pas ?— … Et tu veux que je te dise quoi ? Je suis comme ça, c’est tout. Peut-être parce que je suis maman. Pas la tête à ça. C’est vous qui êtes lourds.— Oh, ça je sais bien, on est encore tous un peu des débiles, à côté de toi, hein ? Parce que t’es la seule à avoir des gosses !— J’ai jamais dit ça !— Non, mais c’est tellement clair… Tu sais, des années que je te connais, on me la fait pas à moi.— Et allez, froncement de sourcils, grimace, et hop… voilà, tu te passes une main dans les cheveux… j’te connais par cœur. Je vais encore avoir droit au couplet moralisateur habituel.— Parce que tu ne changes PAS, Hélène ! ...
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