1. Au coeur de l'espoir


    Datte: 31/05/2018, Catégories: fh, amour, Voyeur / Exhib / Nudisme massage, mélo, amourpass, Lesbienne

    ... attendu d’éprouver des difficultés pour me convertir, alors je renonce, assise sur les marches du parvis. La tête cachée dans les bras, je ne peux plus retenir mes larmes. Une femme pose sa main sur mon épaule et me sourit. Probablement mon attitude suggère que je suis une clocharde. Ne le suis-je d’ailleurs pas devenue d’une certaine manière ? — Vous ne voulez pas vous réchauffer à l’intérieur ? Venez, le repas est prêt. Elle ne me demande pas pourquoi je suis bouleversée. Je suis sensible à la douceur avec laquelle elle m’accueille, comme si j’étais une amie de longue date alors que nous ne nous connaissons pas. Les tables sont dressées. Préparée et servie par des centaines de bénévoles qui se relaient tous les soirs, la soupe de Saint-Eustache est une institution. En mangeant, les uns parlent beaucoup, les autres – dont je suis – se taisent, mais leur regard en dit plus long que des mots sur leur misère. Certains sont des habitués. Il y a là des vagabonds, des marginaux, des sans-papiers, des avec papiers mais sans emploi, des avec emploi précaire auxquels il ne reste plus rien pour manger une fois que loyer et factures sont payés, des salariés qui après trop de stress et un burn-out ne sont plus capables de rien, et aussi des retraités, des simples d’esprit, et toutes sortes d’esquintés de la vie, pas forcément démunis financièrement, mais seuls ; ils n’ont nulle part où aller, sinon là, pour trouver un peu de chaleur humaine. J’avais faim. Une fois rassasiée, je demande ...
    ... à aider à faire la vaisselle pour ne pas avoir l’impression de rester jusqu’au bout une assistée. Les bonnes volontés sont les bienvenues. Chacun est accueilli ; peu importent d’où il vient ni sa foi ou sa non-foi. En écoutant les autres, un moment j’oublie ce qui m’amène ici. La reprise de contact avec la réalité n’en est que plus douloureuse, mais qu’importe. Non, le mal n’a pas envahi le monde. Ici se trouve une Arche d’humanité. Je sors. Où aller ? Rentrer chez moi, dans mon studio de la banlieue sud, prendre une douche et dormir ? L’idée de retrouver mon lit de solitude sans Valma me fait horreur. Il faudra bien s’y résoudre, mais je repousse ce moment en marchant dans les rues, toujours au hasard. Marcher me fait du bien. Minuit trente. Le dernier train doit partir en ce moment même. Non, je ne parviendrai pas à me décider à rentrer chez moi. Avec peut-être un brin de lâcheté, je ne me sens pas prête à affronter seule les feux tournants, sirène hurlante, d’une ambulance qui résonne encore dans ma tête, se frayant un passage parmi la foule de gens indifférents, emportant la femme que j’aime. Un banc m’accueille sur un quai, au bord de la Seine. Un homme s’y trouve déjà. À la lueur d’un réverbère, il est barbu, vêtu d’un long imperméable crasseux et d’un bonnet de laine qu’il ne retire sans doute jamais. Cigarette au bec, il ne sent pas la rose mais le vin premier prix ; en témoignent les bouteilles vides près de lui. Il me regarde curieusement, un peu comme une intruse. ...
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