Les ombres de Jeen
Datte: 12/10/2018,
Catégories:
nonéro,
fantastiq,
... presque nuit quand ils sortirent du café. Immédiatement, Sébastien sentit que Jeen devenait plus nerveuse. Elle regardait fréquemment par-dessus son épaule, lui répondait par monosyllabes. Il lui proposa de la raccompagner jusque chez elle, et elle accepta avec reconnaissance. En appelant sa femme sur son portable, il regarda longuement Jeen, silencieuse, marchant à côté de lui. Les phares des voitures se reflétaient dans les verres de ses lunettes. Elle serrait ses bras autour d’elle, dans une attitude un peu défensive. Il raccrocha, et tenta de la faire parler. Rien à faire. Elle l’écoutait à peine. – Que se passe-t-il, Jeen ? finit-il par demander, assez inquiet. – Rien, répondit-elle immédiatement, d’une voix haletante. Je n’aime pas la nuit. Voilà tout. Le jeune homme sentit sa curiosité aiguisée. – Pourquoi ? fit-il avec un détachement étudié. – Pour rien. Ils restèrent silencieux de longs instants, le bruit de leurs pas résonnant dans l’épaisseur de l’obscurité, à peine dissipée ici et là par quelques réverbères. – Passons par le parc, proposa-t-il. C’est plus court. – Non ! laissa-t-elle échapper, criant presque. Puis elle le regarda d’un air confus. Il haussa les sourcils. – Je suis désolée, dit-elle d’une voix plus basse. Mais je ne veux pas passer par là. – Pourquoi ? s’étonna-t-il, commençant à se méfier de cette fille qu’il ne connaissait pas il y a encore trois jours. Nous gagnerons du temps… Il n’est que vingt heures. Elle dut sentir ses soupçons, car un ...
... sourire embarrassé, presque craintif, étira sa bouche. « Sourire forcé », se dit l’homme, perspicace. – Très bien, renonça-t-elle, regardant ailleurs. Coupons par le parc. Vous êtes avec moi. Ils ne feront rien. Il s’arrêta net au milieu du trottoir. – Quoi ? s’exclama-t-il. Qui vous ferait quoi ? Elle s’agita, tremblante et troublée. Sa nervosité croissait à vue d’œil. – Je voulais dire… les gens. Enfin, des… personnes qui pourraient m’agresser. Quand je suis seule la nuit, j’ai peur… Il lui lança un regard significatif, ne dit rien, puis ils reprirent leur route, et entrèrent dans le parc. À cette heure, il n’y avait plus personne. Entre les arbres flottait une odeur de pommes de pins et d’humidité. Les feuilles abîmées qui gisaient sur les chemins étaient molles sous leurs pas. Il faisait froid, et Jeen resserra son gilet informe autour d’elle. On n’y voyait pas grand-chose, mais Sébastien, son regard fixé sur Jeen, remarqua qu’elle évitait systématiquement de regarder autour d’elle. Son étrange comportement de femme effrayée lui faisait presque peur, parmi les ombres de la nuit, pensa-t-il avec un certain malaise. – Ne me regardez pas ainsi, jeta-t-elle soudain, sans tourner les yeux vers lui. Il sursauta. – Que voulez-vous dire ? chuchota-t-il, comme s’il craignait de réveiller de sombres dangers enfouis sous les racines des arbres qu’ils longeaient. – Je sais ce que vous pensez, dit-elle d’une voix hachée. Je vais vous apprendre quelque chose, Sébastien, ou qui que vous ...