1. Les ombres de Jeen


    Datte: 12/10/2018, Catégories: nonéro, fantastiq,

    ... soyez. Alors écoutez bien. Mes parents m’ont internée dans un hôpital psychiatrique quand j’avais douze ans. Alors croyez-moi, j’ai appris à avoir peur du noir, et aussi à me méfier de la nature humaine. Malgré le bouleversement que provoquait en lui cet aveu, le jeune homme tenta de garder un minimum de maîtrise de soi. Le parc semblait interminable. Il faisait de plus en plus froid. – Jeen, dit-il d’une voix douce. Je ne vous demande rien. – Oui, je sais. Mais j’ai peur. Alors je parle. Vous voulez savoir pourquoi ils ont fait ça ? – Je crois que… non. – Ils pensaient que j’étais folle, tout simplement, poursuivit Jeen, la tête toujours baissée sur ses pieds. Je voyais des choses. Ils n’ont pas compris. Ils n’ont pas voulu comprendre. – Comprendre quoi ? Elle resta silencieuse. Ils marchèrent un moment, puis il voulut passer sous une tonnelle de lierre, mais elle lui saisit soudain le bras, d’un geste brutal, l’empêchant d’avancer. – Non, dit-elle sèchement. Pas par là. Ils y sont. Qui sait s’ils ne vous happeraient pas au fond de leurs ténèbres ? Une stupeur glaciale se glissa dans les membres de l’homme, et il la dévisagea d’un air abasourdi. – Mais de qui parlez-vous, bon sang ? s’écria-t-il avec colère. Mais elle le secoua violemment. – Vous êtes fou ! lança-t-elle d’une voix presque inaudible. Ne criez pas comme ça ! Venez, allons par là. Elle le guida par le bras, et il la suivit, trop étonné pour protester. Peu après, ils sortaient du parc. – Croyez-vous au mal, ...
    ... Sébastien ? demanda Jeen, alors qu’ils approchaient de chez elle. Cette fois, il réprima son sursaut. Le ton léger qu’elle avait employé contrastait par trop avec la gravité inquiétante de sa question. – Écoutez, Jeen, vous ne faites rien pour prouver que vous êtes effectivement saine d’esprit ! dit-il avec agacement. Je vais être tenté de croire qu’ils ont eu tort de vous laisser partir, à l’asile ! Elle le lâcha brusquement, le fusilla du regard, puis la bouche serrée, regarda droit devant elle. Elle paraissait extrêmement blessée. Il regretta ses paroles. – Je suis désolé, vraiment, murmura-t-il platement. Je ne voulais pas dire ça… mais votre attitude me choque, comprenez-vous ? – Je comprends tout à fait, approuva-t-elle d’une voix contenue. Nous sommes arrivés. IV. Il n’arrivait toujours pas à comprendre pourquoi il avait accepté de rester. Jeen avait paru reprendre ses esprits en entrant chez elle, et lui avait proposé de développer les photos de l’après-midi. Il avait pourtant commencé par refuser. Alors que faisait-il encore ici ? Il avait dû rappeler sa femme pour la prévenir qu’il aurait plus de retard qu’il ne le pensait. Et Jeen s’était enfermée dans sa chambre noire depuis plus d’un quart d’heure. Il dégusta son sherry, se sentant fatigué, mal à l’aise, et surtout très irrité de son manque de fermeté envers Jeen. Il aurait dû partir. Mais cette fille l’intriguait. Vraiment. – Je ne vous ai pas trop fait attendre ? lança-t-elle derrière lui, faisant brusquement ...
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