Le vallon
Datte: 17/11/2018,
Catégories:
amour,
nonéro,
... Il ne lui restait plus aucune feuille blanche ! Alors, Niels sentit la fatigue mais cette fatigue n’avait plus importance car elle cédait le pas sur un autre sentiment : Niels était heureux. Il avait atteint le but que depuis longtemps déjà il s’était fixé: écrire. Et cette joie qu’il éprouvait d’avoir produit dominait cette faiblesse qui se lisait sur ces traits, sur sa main crispée par l’ouvrage. C’est non sans gravité, avec componction même qu’il descendit du vallon, comme Zarathoustra naguère, était descendu de la montagne. Niels, comme la veille, rentra chez lui. Non pas comme la veille. Déjà, il était différent : il n’était plus le même, pour longtemps. Son sommeil fut rapide. Il dormit bien et paisiblement. Autant Niels dormait avec facilité, autant son réveil fut prompt et aisé. Niels au réveil doutait de ce qu’il avait vu, de ce qu’il avait entendu, mais il ne douta pas longtemps car la vue des feuilles calligraphiées de sa plume sur la table, de l’encre incessamment usité, fit de son rêve une incontestable réalité. Qu’il se sentit alors rassuré de n’avoir pas rêver, qu’il se sentit donc heureux d’avoir vécu cette réalité ! Il sortit vivement de son lit et se précipita sur ses feuilles qu’il relut avec avidité. Une fois sa lecture achevée, une poussée d’orgueil l’envahit : c’était bien ! Il voyait un réel talent dans ces lignes, talent peu mature mais talent certes ! Il se promit alors de progresser et d’atteindre ce niveau duquel on connaît le succès. En attendant, ...
... bien secrètement, il ne montrerait rien de ses oeuvres. Il voulait atteindre le point de perfection avant de se déclarer au public. C’était une petite ombre dans son caractère. Niels avait de l’amour propre, peut-être trop. Si par quelque hasard, on le surprenait au milieu de son travail, il entrait dans une furie telle qu’il en devenait incontrôlable. Ce trait doit être précisé pour comprendre Niels, car il est la cause d’un malheur qui lui vînt par la suite. Niels sortit de chez lui avec son bagage habituel. Il suivit son itinéraire accoutumé. Enfin il se retrouva au pied de cet arbre qu’il considérait comme la source évidente de son inspiration. Répétant ainsi le refrain des jours passés, il attendait Muse et son cortège de bonnes idées. — Ô inspiration, dit-il, que de fois je t’ai attendu Que de fois ne t’attendant plus tu es venue ! Cela rimait fort mal, Niels le savait bien; il savait bien aussi qu’il pouvait mieux faire et il chercha encore. Alors des images déferlaient une à une, se présentaient librement à lui, et étaient commentées par sa raison. À chacune de ces images, selon qu’elle lui plaisait plus ou moins, l’image retenait son attention ou disparaissait dans l’oubli. C’est ainsi que le visage d’Isolde lui apparut. Il y arrêta sa pensée. Puis il prit sa plume et écrivit : A ce moment, Niels s’arrêta, non pas que l’inspiration ne lui vînt plus - bien au contraire, elle bouillonnait jusque dans ses veines - mais il s’arrêta parce qu’il avait pris conscience de ce ...