Jeux de miroirs
Datte: 13/02/2019,
Catégories:
sf,
fantastiqu,
merveilleu,
fantastiq,
merveille,
... plein ciel. » À la tombée du jour Je passe le reste de la journée à découvrir les paysages de l’île sur les talons de Marie-José. Vue d’ici, la guerre est comme une histoire, on n’y croit plus vraiment. Ni à la guerre ni au reste du monde. L’une de ces phrases sans queue ni tête dont je suis coutumier me trotte dans la tête : « Son père l’a conçue dans un éclat de rire ». Le rire est la langue maternelle de Marie-José. Elle a un très joli rire, très original : elle lève son visage vers le ciel, elle ferme les yeux et rit presque silencieusement. Sans avoir le moins du monde prémédité ce geste, je me surprends à embrasser le joli visage tourné vers le ciel. Contact léger et bref avec ses lèvres. Marie-José recule d’un pas et me considère avec grand étonnement. — Voilà qui pourrait devenir un vrai problème, murmure-t-elle. Étonné, je le suis aussi, furieux contre moi-même. Quelle mouche m’a piqué ? Pendant le trajet de retour nous maintenons deux pas entre nous et un lourd silence. Alors que déjà nous apercevons le toit de Guanahani à travers les arbres, Marie-José me prend le bras. — Attends ! Ferme les yeux. Je sens, rapides, ses lèvres se poser sur les miennes. — Comme ça, nous sommes quittes, dit-elle. Elle part en courant en direction des vagues. Sans ralentir sa course, d’un mouvement d’épaules très fluide, elle jette sur le sable sa chemisette. En deux coups de pieds, elle envoie voler ses espadrilles. Le léger pantalon de coutil reste à son tour en arrière. Et moi ...
... qui cours derrière en collectant machinalement ces pièces d’habillement. Elle saute dans l’eau et je reste sur le bord, tenant à deux mains, aussi pieusement qu’un prêtre porte le Saint Sacrement, une émouvante petite culotte. Elle rit et je ris aussi, plonge tout habillé dans les vagues. Marie-José me traite de boyaux crevés, me demande si je veux attraper la mort, me ramène sur le bord. Là, elle se souvient qu’elle est nue, constate sans rire : — Le problème continue de s’aggraver ! Elle rafle prestement ses vêtements, détale, s’habillant avec la même agilité, galope en direction de Guanahani où Lourdès lève les yeux au ciel en m’apercevant. — Jésus, Marie, Joseph, ce garçon est fou ! Et ça veut devenir docteur ? Ah, on a bien raison de dire que les cordonniers sont toujours les plus mal chaussés !… Dans la tempête Ce soir, les chiens sont lâchés, toute une meute de grands chiens couleur d’écume venus de l’ouest. Ils se déchaînent sur la lande. La tempête a ceci de bon que les grands oiseaux de fer resteront au nid, à couver leurs redoutables œufs. Les « oiseaux boum-boum » comme disait un garçon que j’ai rencontré au cours de mon voyage. Pendant le dîner je raconte ma visite au docteur Ventre et j’évoque notre conversation portant sur l’hypnose. Comme je m’y attendais, et j’écris ces mots avec un sourire, mes propos ne suscitent pas un enthousiasme sans faille chez les Brésiliens. Pour eux, comme pour une bonne partie de nos contemporains, le mot hypnose charrie dans son ...