1. La copine de ma copine


    Datte: 07/04/2019, Catégories: fh, Oral pénétratio,

    ... croise sont tristes ; et pourtant ils étaient tous libres, alors que moi je croupissais au fond de la geôle, avec les rats et les cafards, et l’odeur des chiottes qui embaumait les nuits chaudes de juillet. J’ai passé trois ans de ma vie en taule, trois ans de ma jeunesse, perdus comme des feuilles d’automne, pour une injustice pure et simple. Je ne sais pas combien coûte chaque année, à combien revient chaque jour, chaque instant. Il va payer cher, Mokhtar. Je serai sans pitié. Je n’ai plus de sentiments, mon âme est lézardée, ma cavité est vide. Cela fait trois ans que je rumine ma colère, comme la vache broute l’herbe et le foin, avec patience, flegme, et une impressionnante obsession. Aucun obstacle ne viendra troubler ma détermination, nul frémissement ne retiendra ma main, gonflée de haine, avide de sang. Il doit dormir sur ses lauriers ; il doit penser que je suis encore dedans. Personne n’est au fait de ma remise de peine. Le jour où il se réveillera, ce sera trop tard pour lui car j’aurai frappé comme le destin, avec la rage du tonnerre et la rapidité de l’éclair. ---oooOOOooo--- Je traverse la grande rue, devant les gendarmes en kaki qui gardent le carrefour, à qui je souris, mais qui font comme si je n’avais jamais existé, et me voilà dans mon quartier de briques et de béton. À commencer par le Café de la Jeunesse ; quatre vieux jouent à la belote sur la terrasse, d’autres discutent grave, et un chauve est enfoncé dans son journal, sans doute à la page des sports. ...
    ... Ils sont tous mal rasés et mal habillés, et ceux qui fument tiennent des cigarettes sans filtres entre des dentiers en ruine. Mais le comble, c’est qu’ils ont tous l’air heureux. Du moins, ils ne paraissent pas avoir de soucis. Un garçon à l’intérieur se tient debout devant la machine à café, derrière le bar. Il a l’air chétif, miné par l’alcool et le tabac : ça se voit dans ses yeux. Il doit avoir la cinquantaine et ne devrait pas vivre beaucoup plus. C’est un nouveau que je n’ai jamais vu. — As-tu vu Mokhtar, lui dis-je ?— Mokhtar ? C’est qui ? me fait-il, en toussant comme s’il allait cracher ses poumons.— Le grand et brun, avec une cicatrice sur l’arcade, et un blouson de cuir.— Je ne le connais pas.— Et Salem, l’ancien garçon.— Salem, cela fait plus de deux ans que je l’ai remplacé, je ne l’ai jamais vu depuis. Après le café il y a un terrain vague, plein d’ordures et de gravats, puis la boucherie de Hamad, fermée, puis une quincaillerie, puis une boulangerie et un restaurant de poulets rôtis. Au Café de l’Aube, je trouve un autre nouveau garçon qui ne connaît pas Mokhtar. La rue continue, les commerces et les cafés défilent en face de la chaussée fêlée, les trottoirs sont de pierre, de poussière et d’immondices. Les voitures et les bus passent en crachant leur fumée grise ; l’odeur du gas-oil se mélange aux émanations des ordures. Les murs de briques et de béton sont mal alignés, souvent nus, sans peinture, avec des fenêtres fermées et de longs étalages de linge sur les ...
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