Pénétration illégale
Datte: 09/04/2019,
Catégories:
fh,
copains,
amour,
mélo,
fantastiq,
amourdram,
regrets,
Dans le reflet de la vitre scintillent les lueurs du feu tricolore, et ma silhouette, dédoublée. Perdue dans mes pensées, je n’y avais pas pris garde. Je me distingue enfin. Je contemple la paroi lisse et constellée de gouttes, où un visage, surmonté d’un bonnet bleu passablement ridicule, me renvoie mon regard. Ses traits sont flous, incertains. Je me détourne, souffle sur mes mains pour les réchauffer, et les enfile dans mes poches, jetant un œil alentour. Il est tard. Autour de moi, sous l’abribus, quelques personnes, l’air fatigué. Deux étudiantes, silencieuses. Un homme d’une quarantaine d’années, grand manteau gris anthracite tombant sur les mollets, mallette noire à la main. Une dame d’un certain âge, cernes aux yeux, traits tirés, s’emmitouflant frileusement dans sa doudoune. Le bus arrive enfin. Dernier regard sur la vitre de l’abribus, dernier regard pour cette forme incertaine. Je monte. Il est là. Je le vois parfois se déplacer dans la pièce, vague ombre sombre contre le jaune lumineux de ses rideaux. On dirait qu’il a allumé toutes les lumières. Mais moi je suis ici, faisant le pied de grue, dehors dans le froid. Les yeux levés vers les fenêtres de son appartement, j’hésite, si faible soudain. Je suis à dix pas de l’entrée. Je pourrais monter, je suis venue pour ça, après tout. Lui dire… tout. Parler de tout… de rien… comme avant. Mais je suis lâche. Je me dégonfle. Je mordille la peau de mes lèvres, me faisant un peu saigner. Distraitement, j’aspire le sang, ...
... remonte les yeux vers le deuxième étage. Je me sens nulle. Je prends une décision. D’une main tremblante, je sors mon portable de ma poche, et tape un texto très vite, pour ne pas me laisser le temps de changer d’avis. J’appuie sur « envoi ». Voilà, c’est fait. Plus moyen de reculer. À part si je fuis en courant dans n’importe quelle direction… Je me balance d’un pied sur l’autre, titillée par cette idée, sentant ma petite motivation fondre comme neige au soleil. Il tarde à répondre. Qu’est-ce qu’il fiche, bon sang ? J’essaie tant bien que mal de me remonter le moral. C’est Rafe. Il va me répondre. C’est Rafe, quoi ! Il va me répondre. Il va me laisser monter. Il va comprendre. Enfin, une alerte à deux tons. J’ouvre fébrilement le clapet de mon téléphone. Hein ? Je tombe des nues. Quoi, pourquoi ? À ton avis, Rafe ? Je tape ma réponse avec nervosité. Envoi. J’attends. Rien. Soudain, un mouvement, là-haut derrière le rideau. Il est là, il me cherche des yeux, me repère, son téléphone à la main. Je dois faire cruche, plantée sous le lampadaire, avec mon bonnet bleu. Son regard, malgré la distance, est intense. Je frissonne. Mauvais pressentiment. Non, il ne va pas me laisser dehors… si ? Il ne va pas faire ça. Il n’osera pas ! Il ne bouge pas. Il baisse la tête, regarde de côté, pensif. Il hésite ? Merde alors ! Il hésite ! C’est quoi ce plan foireux ? J’ai le cœur qui bat très vite. Je n’aime pas ça. Il me regarde à nouveau. Non, j’aime pas ça… Il tapote son mobile, puis pose à ...