1. Le papyrus d'Anubis


    Datte: 06/07/2019, Catégories: fh, hotel,

    ... secondes. J’étais terrorisé à la fois par la folie de mon geste mais aussi par ce que je ressentais dans mon corps et dans ma tête. Tendu et angoissé, redoutant de voir à tout instant surgir la police ou un gardien, je quittai précipitamment le musée et j’allai m’asseoir sur un banc de pierre dans le jardin à l’ombre de la tombe d’Auguste Mariette. Le jardin du musée du Caire est un minuscule espace de verdure broyé par l’extraordinaire pression de la mégapole. Écrasé par l’énormité de ce qui venait de se produire, je restais là, perdu, des tambours battaient dans mes tempes, mes mains semblaient dotées d’une vie propre tellement elles tremblaient. Lentement je repris le contrôle de ma vie ; notez que je n’écris pas : je repris mes esprits, car aujourd’hui je sais qu’en réalité à ce moment je perdis mes esprits, ou plutôt mes esprits me quittèrent momentanément. Le petit étui que j’avais glissé dans la ceinture de mon pantalon me brûlait le ventre, il me semblait que tout le monde me fixait, que les gardiens se retournaient sur moi. Je me levai et me dirigeai lentement vers les grilles de la sortie, j’atteignis le parking où un troupeau d’autobus ronronnait, me frayant un passage dans une jungle touffue de vendeurs à la sauvette et de chauffeurs de taxi, et j’entrai dans la fraîcheur de l’hôtel Nile Hilton comme on pénètre dans la pénombre d’une cathédrale. Assis au fond de la cafétéria qui domine le Nil et ses rives mangées par l’urbanisme, je bus un verre de carcadet frais, ...
    ... tentant nerveusement de joindre le portable de Chantal, n’obtenant que la voix stéréotypée d’une opératrice répétant : « the number you’ve dialled can not be joined, please… », ponctué de trois affreuses notes de musique nasillardes et dissonantes. Enfin la tonalité prolongée d’un appel fit vibrer mon appareil, c’était elle, plus inquiète que furieuse, mais hurlant malgré tout dans le combiné. Lorsque, quelques minutes plus tard, elle fit son apparition, me trouvant du regard, ses yeux étaient d’acier, elle gesticulait et parlait à haute voix sans soucier des autres personnes : — Mais qu’est-ce qui t’arrive, ça va pas non ? Tu disparais, tu me fais rater le trésor de Toutankhamon, tu aurais pu me prévenir que tu partais au moins non ?… oh ! Je te parle, réponds ! T’es malade ou quoi ?— Assieds-toi, lui dis-je, écoute, je sais pas comment te dire, c’est…c’est dingue, pas croyable quoi, enfin je veux dire, tu vas pas me croire.— T’as plutôt intérêt à être bon, parce que bonjour le premier jour des vacances en Égypte. Je lui fis un récit rapide mais précis de ce qui venait d’arriver tout en soulevant mon tee-shirt pour lui montrer l’étui de cuir passé dans ma ceinture. Au début elle fut sceptique, croyant à une blague de ma part, puis dubitative, puis carrément condescendante, hochant la tête avec mépris : — Non mais c’est tout ce que tu as trouvé ? Tu rigoles, non ? Attends ! Tu ne penses pas que je vais croire ça ? Tous les mecs qui t’agressent à la sortie du musée te vendent ...
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