1. Les larmes d'Antigone


    Datte: 24/07/2019, Catégories: copains, nonéro, portrait, Collègues / Travail

    ... aujourd’hui sa revanche. Avec affection, à des années-lumière de tout ce que j’avais pu imaginer d’elle, Anne-Sophie tentait maintenant de recoller les morceaux. Elle me tendait la main et sa sollicitude me fit monter les larmes aux yeux. — Tu parles sérieusement ? C’est une véritable invitation ?— Bien sûr. En quelques secondes, tout venait de basculer. Je ne rêvais plus de vengeance mais d’amitié. — Alors, je viens. Je te remercie de tout cœur, ça me touche vraiment, surtout en cet instant. Mais Élodie… est-ce qu’elle va être d’accord ?— Elle n’attend que ça, tu sais ! Lorsqu’Élodie revint, un peu plus tard, un regard leur suffit pour se comprendre. Sans un mot, tout fut dit. Je découvrais tout à coup une incroyable complicité que je n’avais jamais soupçonnée. Elle se rassit à sa place, sourit et me dit simplement : — Merci beaucoup Mickael. Rien ne pouvait me faire plus plaisir. Je venais d’entrer dans le monde magique d’Anne-Sophie et Élodie. Ce qui est bien avec Élodie, c’est qu’on n’est jamais seul. Cela faisait plus d’une heure que nous roulions et ni Anne-Sophie ni moi n’avions eu besoin d’ouvrir la bouche. Zébulon s’occupait de tout. Officiellement, elle était assise derrière moi, mais en réalité son visage était un coup à ma droite, un coup à ma gauche, un coup collé à mes oreilles et vu la vitesse avec laquelle elle se déplaçait, j’avais parfois l’impression de l’entendre en stéréo. Il n’y a que devant le rétroviseur qu’elle n’était pas encore passée mais avec ...
    ... elle, tout pouvait arriver. Et j’étais prié de suivre sa conversation même si elle se résumait pour l’instant à un long monologue. Régulièrement, elle me rappelait à l’ordre avec une tape sur la tête suivi d’un : — Tu m’écoutes quand je te parle ? Après avoir eu tous les détails de la dernière exposition sur l’art aztèque, nous nous attaquions maintenant au cinéma indien. Anne-So s’était mise à l’aise, les pieds nus sur le tableau de bord et m’indiquait la route tout en suivant la conversation de sa copine, ce qui était déjà en soi un exploit impressionnant. Mais en plus, elle trouvait le moyen de lire et d’annoter un article de génétique d’une complexité telle que je n’en comprenais pas les dix premières lignes ! Moi je conduisais, heureux, coincé entre la plus délurée des biologistes et une peste nymphomane à dix cerveaux, en route pour une improbable journée au bord de la mer dont je savais déjà qu’elle allait changer ma vie. Tout à mes rêveries, je ne cherchais même plus à savoir ce qui se passait du côté de Bollywood quand une claque entre les deux oreilles me ramena brutalement à la réalité. — Si ça ne t’intéresse pas, il faut le dire. Tu préfères nous parler d’autre chose ? Vas-y, on t’écoute.— Euh….— Tu ne veux rien dire ? D’accord, alors c’est moi qui pose les questions. Et tache de bien répondre ou tu vas encore te retrouver à poil. Anne-Sophie sourit, tout en surlignant quelques mots. — Méfie-toi, en public, c’est attentat à la pudeur, ça se termine en garde à vue !— ...
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